Notules dominicales 2007
 
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Notules dominicales de culture domestique n°301 - 1er avril 2007

DIMANCHE.
Itinéraire patriotique départemental. J'ai l'occasion de réaliser un beau tir groupé aujourd'hui : les villages de Bouxières-aux-Bois, Bouxurulles et Bouzemont sont presque aussi proches géographiquement qu'alphabétiquement. A Bouxières, pas de monument visible et l'église, où il pourrait se cacher, est fermée. J'ai plus de chance à Bouxurulles, il n'y a pas non plus de monument extérieur mais une femme est en train de faire le ménage dans l'église. Elle m'explique : "On a un monsieur qui est pas bien dans le village alors, au cas où..." Le monument au mur est une merveille, un vrai retable avec une partie centrale en bois sculpté.

TV. Jimmy the Gent (Michael Curtiz, E.-U., 1934 avec James Cagney, Bette Davis, Allen Jenkins, Alan Dinehart; diffusé ce mois sur TCM).
Ce n'est peut-être qu'une impression due à ce film très moyen mais le style aboyeur de James Cagney a bien du mal à passer aujourd'hui.

LUNDI.
Vie politique. A voir comment les deux candidats favoris pour l'élection présidentielle malmènent leurs états-majors, entourages et partis respectifs, donc, a priori leurs plus fidèles supporters - l'un, le petit, tempête, tance et vitupère, l'autre, la grande, ignore, snobe et méprise - on peut s'interroger sur la façon dont sera traité l'ensemble de la population si l'un des deux vient à l'emporter.

MARDI.
Presse.
Parution de l'article Montebello dans La Liberté de l'Est, lisible ici : http://pdidion.free.fr/chroniques/chroniques_2007.htm

TV. Mr. & Mrs. Smith (Doug Liman, E.-U., 2005 avec Brad Pitt, Angelina Jolie, Vince Vaughn; diffusé en février dernier sur Canal +).

MERCREDI.
Emplettes. J'achète un polar norvégien et Les vies minuscules de Pierre Michon.

Vie méridienne. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Le Monde du jour, et en une s'il vous plaît : "La sieste c'est bien. Nous sommes souvent en dette avec le sommeil, dont nous manquons, et donc moins vigilants. Pour nous en acquitter, rien ne vaut une sieste courte : pas plus de vingt minutes de sommeil." Pour arroser ça, je plonge une heure complète.

Vie horticole.
Cette fois, le drapeau est levé. Je plante des Merveilles de Kelvedon et des Carouby de Maussane. C'est beau les variétés de légumes, on dirait des noms de chevaux.

TV. Sexe, mensonges et vidéo (Sex, Lies and Videotapes, Steven Soderbergh, E.-U., 1989 avec James Spader, Andie McDowell; Peter Gallagher, Laura San Giacomo; diffusé cette semaine sur Paris Première).

Livre. La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette. Millénium 2 (Flickan som lekte med elden, Stieg Larsson, Norstedts Forlag, Stockholm, 2006; Actes Sud 2006, coll. actes noirs pour la traduction française; traduit du suédois par Lena Grumbach et Marc de Gouvenain; 656 p., 23 €).
Suite des aventures du journaliste économique Mikael Blomkvist et de l'intrigante Lisbeth Salander, découverts dans Les hommes qui n'aimaient pas les femmes, aux prises cette fois avec un réseau spécialisé dans le pain de fesses. 80 pages de plus pour un prix majoré de 20 centimes seulement, l'entreprise est honnête. Honnête mais un peu casse-gueule après la belle réussite du premier tome de Millénium. Et il faut bien dire que l'on baisse ici d'un cran dans l'intérêt : l'auteur consacre beaucoup de temps à relier les deux volumes, à recadrer les personnages, à les mettre dans une nouvelle situation et ce n'est qu'au bout de deux cents pages que démarre la nouvelle histoire dans laquelle un des protagonistes va se voir accuser de meurtre. Après, le récit s'emballe, part dans de multiples directions qui ne sont pas toujours faciles à suivre : on se prend à regretter l'univers insulaire et familial de la première aventure qui circonscrivait l'enquête dans un périmètre donné. De plus, Stieg Larsson use de ficelles plutôt commodes, un personnage dont les talents de hacker facilitent l'intrusion dans tous les ordinateurs du pays, un malabar souffrant d'analgésie congénitale qui lui permet de jouer les Terminator indestructibles, ce genre de choses qui font un peu bas de gamme. Bas de gamme aussi certaines annotations psychologiques, certaines phrases du genre "En revenant dans la chambre, elle s'arrêta toute nue devant le miroir de l'armoire et examina son corps avec émerveillement" qu'on croirait sorties d'un roman de Gérard de Villiers. On gardera toutefois au crédit de Larsson la volonté politique qui l'amène à s'attaquer à la corruption sexuelle après avoir dénoncé son pendant financier dans le premier volet. Il en reste un à paraître, on le lira parce que, malgré les défauts exposés précédemment, ça reste du polar de fort bonne tenue.
Bourde. "Alexander Zalachenko est né en 1940 à Stalingrad en Ukraine, dans l'Union soviétique de l'époque." (p. 544)

JEUDI.
TV. The Shield (série américaine de Shawn Ryan, 2006 avec Michael Chiklis, CCH Pounder, Forest Whitaker, Catherine Dent, Benito Martinez, Walton Goggins; saison 5, épisodes 9 & 10 diffusés le soir même sur Canal +).

VENDREDI.
TV. Layer Cake (Matthew Vaughn, G.-B., 2004 avec Daniel Craig, Colm Meaney, Kenneth Cranham, Tom Hardy, Jamie Foreman; diffusé ce mois sur Canal +).

SAMEDI.
Football. SA Epinal - Saint-Quentin 1 - 2.

Courriel. Une demande de désabonnement aux notules.

Bon dimanche.

N.B. Le prochain numéro des notules sera servi le 15 avril.

 

Notules dominicales de culture domestique n°302 - 15 avril 2007

DIMANCHE 1.
Lecture. Une pièce montée (Blandine Le Callet, Stock, 2006; 324 p., 17,50 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet 2007).
"Depuis que tu m'as quittée, Vincent, j'ai l'impression d'être enfin devenue une femme..."

Fragmentation numérique.
Je lis un article consacré au quartier général de Ségolène Royal, sis 282, boulevard Saint-Germain. J'apprends que les initiés ne disent pas 282 mais 2-8-2 en détachant les chiffres. Cette tendance, qui vient peut-être de l'habitude anglo-saxonne de décomposer les numéros de téléphone, de rue ou de codes divers, cette tendance donc, après avoir transité par le fameux 9-3, atteint maintenant des zones inattendues comme le collège de Châtel-sur-Moselle, Vosges profondes, où on ne parle plus des 6e 3 ou des 4e 4 mais où il est de bon ton d'évoquer les 6-3 et les 4-4. Venu en compagnie d'une flopée de "c'est clair" et de "allô t'es où ?" dans le bagage langagier d'une citadine attachée à parler jeune, ce tic a désormais gagné tous les étages de la hiérarchie de l'établissement où certaines conversations ressemblent désormais à des commentaires de grilles de sudoku, de bataille navale ou de matches de tennis. Curieusement, les seuls qui n'emploient pas cette terminologie sont les élèves, dont c'est pourtant censé être le langage, qui continuent à se dire en 6e 3 ou en 4e 4.

Voyage. Je pars pour Paris par le 19 heures 32. J'ai beau être en vacances et voyager pour mon plaisir, je ne peux m'empêcher de retrouver quelques sensations désagréables liées aux trains du dimanche soir. Le train du dimanche soir n'a décidément pas le même goût que les autres. Même à des années de distance, il garde son parfum particulier d'abandon de famille, de retour à l'internat, à la caserne, il est plus chargé en gueule de bois. En arrivant dans ma chambrette, je fais un peu le ménage, ça manque parfois un peu de rigueur dans le plumeau par ici, jette du bout des doigts une vieille paire de chaussettes et déniche au fin fond du placard le boîtier d'un DVD apparemment polonais intitulé "Animal Sex" et couvert de photos qui m'interloquent durablement. Je me couche non sans avoir vigoureusement secoué les draps du pucier pour en expulser d'éventuels poils de chien oubliés par le/la/les précédents occupants.

LUNDI 1.
Vie parisienne. Je passe une partie de la matinée au Louvre, aile Richelieu, deuxième étage, cabinet II, puis pars à la recherche d'un salon de coiffure qu'on m'a indiqué rue Faidherbe. Après la sieste, je profite d'un rendez-vous rue Huyghens pour aller arpenter, à quatre pas de là, le cimetière du Montparnasse. Ca change du Père-Lachaise, c'est moins pentu et ça me rapproche de mes sépultures familiales, je crois que mes grands-parents sont au cimetière de Montrouge, il faudra bien que j'y aille un jour. Je commence par les points de passage obligés, Gainsbourg, Sartre-Beauvoir, et un fils adoptif du commandant Aupick, comme disait Perec, qui, c'est écrit sur la stèle, mourut à l'âge que j'ai. Le mieux dans ces endroits est encore de se laisser guider par le hasard, ce qui me permet de découvrir la dalle-échiquier d'Alexandre Alekhine "Génie des échecs de Russie et de France", les photogrammes qui ornent la tombe d'Henri Langlois (Léaud, Welles, Chaplin, Artaud...) et la fort féculente association des familles Parmentier - Pluche, de corvée dans le même caveau. Mais il fait chaud et j'interromps rapidement mes déambulations pour ligoter sur un banc en attendant que le soleil se cache derrière les façades de la rue Froidevaux.

Lecture. Un hiver de glace (Daniel Woodrell, 2006, Payot & Rivages, coll. Rivages/Thriller, 2007 pour la traduction française; traduit de l'américain par Frank Reichert; 192 p., 17 €).
Ree Dolly, une jeune fille de seize ans élève seule ses deux frères : le père, fabricant de cocaïne, a disparu après avoir hypothéqué la maison contre une liberté conditionnelle et la mère a sombré dans une douce folie. Ree part à la recherche du père dont l'absence au tribunal signifierait la perte du seul bien qui reste à la famille, sa maison.
Daniel Woodrell reste fidèle à son cadre de prédilection, les monts Ozark, et à ses personnages déglingués, un quart-monde rural marqué par la mouise et la consanguinité. Jamais cependant il n'était allé aussi loin dans la noirceur que dans cette chronique sordide qui n'est pas sans rappeler L'Histoire de Bone de Dorothy Allison où l'on voyait aussi une jeune fille se battre contre la force d'un clan. Comme dans les autres romans de Woodrell, c'est le décor qui est le plus important et le plus impressionnant, ces montagnes, cet hiver épouvantable, une Amérique arriérée, violente, sale et méchante à mille lieues des clichés habituels.

MARDI 1.
Lecture. Cahin-caha (Anne Lenner, Le Dilettante, 2005; 192 p., 15 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet 2007).

Vie parisienne (suite). Au cours de ma promenade matinale dans le coin de Saint-Germain, je tombe sur un dazibao de Marc-Edouard Nabe qui a choisi désormais de couvrir les murs parisiens de ses pamphlets. Après "Et Littell niqua Angot" consacré à la rentrée littéraire, celui-ci, intitulé "Représente-toi" est adressé à Jacques Chirac.

Vie ferroviaire. Jour de gloire pour la SNCF, le TGV, tel une Manaudou sur rails, vient de battre un record de vitesse. Les contrôleurs en ont le rose au front et la pincette fébrile. D'ailleurs, immense honneur, le 18 heures 55 est un TGV, c'est une première, un baptême pour moi. Bien sûr, il ne roule pas encore à grande vitesse, ce sera pour le mois de juin avec les 30% d'augmentation de tarif pour fêter l'événement, c'est encore la version sénateur habituelle avec vingt minutes de retard à Nancy, ce qui m'en laisse tout de même deux, pas mal, pour attraper ma correspondance pour Epinal. C'est un beau raccourci de la politique SNCF, le prestige, l'image glorieuse poussée en avant pour masquer l'impéritie du quotidien.

MERCREDI 1.
Emplettes. J'achète le volume Quarto d'Artaud.

TV. Sex-shop (Claude Berri, France 1972 avec Claude Berri, Juliet Berto, Jean-Pierre Marielle; diffusé ce mois sur CinéCinémas Culte).
La crise de la librairie version années 1970 : un libraire dont le commerce bat de l'aile transforme son magasin en sex shop. On notera la présence de Pierre Louki dans le rôle d'un officier de l'Armée du Salut en croisade contre la pornographie.

JEUDI 1.

Lecture. Rhésus (Héléna Marienské, P.O.L., 2006; 320 p., 19 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet 2007).
C'est désormais devenu assez fréquent : le livre, à la manière de La Vie mode d'emploi, se termine par un post-scriptum ainsi libellé : "Ce livre comprend des citations, souvent modifiées voire anamorphosées de : Honoré de Balzac, Charles Baudelaire, René Belletto, la Bible, François Bon, Céline, François-René de Chateaubriand, René Char, Eric Chevillard, Cicéron, Colette, Denis Diderot, Euripide, Marco Ferreri, Gustave Flaubert mais le moins possible, La Fontaine, Sigmund Freud, André G., Olivier Gallet, Anne F. Garréta, Homère, Internet, Mme de Lafayette, Michel Leiris, Marie Louise, David Lynch, Herman Melville, Henri Michaux, François Mitterrand, Michel de Montaigne, Vladimir Nabokov, Blaise Pascal, Gargas Parac, Georges Perec, Gurgus Puruc et surtout Gyrgys Pyryc. Mais aussi de Marcel Proust, François Rabelais, Arthur Rimbaud, Paul Scarron, Stendhal, Laurence Sterne, Elise Viguier, Dominique de Villepin et Marguerite Yourcenar. Les citations de Raymond Queneau ont été, ponctuation exceptée, fidèlement restituées."
Concernant Perec, cela va même un peu plus loin puisque l'auteur redonne vie dans sa fiction à Lino Margay et Ferri le Rital, deux personnages du chapitre LXXIII ("Histoire du bourrelier de sa soeur et de son beau-frère") de La Vie mode d'emploi, non sans d'ailleurs s'emmêler un peu les pinceaux ("Lino et Margay sont arrivés ici quelques semaines plus tard...", p.124).

VENDREDI 1.

Voyage. La garde de nuit prend fin à 8 heures. J'archive la dernière leçon de Compagnon sur Proust au Collège de France (peut-être trouverai-je même un jour le moyen de l'écouter) et nous partons à 8 heures 17. Neuf heures de route pour passer d'une température de - 2 à + 18°, c'est long mais ça vaut le coup. Nous touchons au but, l'appartement parrainal de Mandelieu-La Napoule, en fin d'après-midi.

SAMEDI 1.

Lecture. L'enfant qui maudit Dieu (Jean-Moïse Braitberg, Fayard, 2006; 264 p., 17 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet 2007).
Curiosité 1. Un personnage nommé Emilie page 10 qui devient Amélie page 11.
Curiosité 2. 14 pages blanches à la fin du volume, comme un vulgaire Je me souviens.

DIMANCHE 2.
Vie pascale. Cette année, le soleil ne fera pas fondre le chocolat. D'abord il n'y a pas de soleil, ensuite, question friandises, le chocolat est désormais malvenu et nous en sommes réduits au régime oeufs durs et lapins plastique.

Vie culturelle. Ce n'est pas parce qu'on est en vacances qu'il faut négliger l'éducation et la culture. Ce soir, les filles découvrent La grande vadrouille à la télévision.

Lecture. Je vous souhaite la pluie (Elizabeth Tchoungui, Plon, 2006; 240 p., 18 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet 2007).
Fin de mes devoirs de vacances sous ma casquette du lecteur-juré pour le Prix Fallet. Les cinq premiers romans sélectionnés semblent, d'une année sur l'autre, répondre aux mêmes tendances : les caractères choisis sont de plus en plus gros pour épaissir artificiellement le volume (quand on ne balance pas des cahiers entiers de pages blanches), l'autobiographie paresseuse mal déguisée sous les oripeaux fatigués du mot "roman" est toujours le genre privilégié, il permet de ne pas creuser bien profond et de recourir à l'excuse de cour de récré "ce n'est pas moi, c'est le narrateur", le voyage Afrique-France inspire toujours, surtout depuis le succès du Ventre de l'Atlantique de Fatou Diome, la recherche de l'humour par le biais d'une langue prétendument audacieuse est un naufrage. Comme chaque année, il y a un livre prometteur qui ne tient pas ses promesses mais comme chaque année aussi il y a une belle surprise (La théorie des nuages de Stéphane Audeguy l'année dernière), un roman qui parvient à surprendre parce qu'il propose un peu d'esprit, d'histoire, de souffle et qui aura ma voix (ce qui n'est pas bon signe pour l'auteur parce que jamais le prix ne fut décerné à un livre que j'avais choisi de couronner). Un roman sur cinq, si c'est le reflet d'un échantillon représentatif, ce n'est tout de même pas mal.

MARDI 2.
Vie ferroviaire. Les filles font leur baptême du rail entre La Napoule et Cannes.

TV. Football. FC Valence - Chelsea 1 - 2, en direct sur TF1.

MERCREDI 2.
Souffle coupé. Aujourd'hui, Télérama publie une page de publicité pour Capital Souffle, "un programme de sensibilisation et d'information sur les maladies respiratoires chroniques", illustrée d'une photo de Loïc Leferme, champion du monde d'apnée et parrain de l'association. Aujourd'hui, Loïc Leferme a trouvé la mort au cours d'un entraînement à l'entrée de la rade de Villefranche-sur-Mer.

Vie festive. Après les Pâques sans chocolat, nous expérimentons l'anniversaire sans gâteau.

Lecture.
Contrebande (André Blanchard, Le Dilettante, 2007; 320 p., 20 €).
Carnets 2003 - 2005.
André Blanchard, c'est lui qui le dit page 190, est du "genre plouc vivant à Vesoul". En tant que représentant du genre plouc vivant dans une préfecture proche de Vesoul, on peut le considérer comme une sorte de voisin en géographie et en ploucocratie. J'aime bien Vesoul, d'abord pour raison sportive. Cela fait plusieurs années que les équipes de football d'Epinal et de Vesoul, maillot bleu, végètent dans le même groupe de Championnat de France Amateur avec le même manque d'éclat, en général le SAS bat Vesoul à la Colombière et Vesoul prend sa revanche à domicile, encore dimanche dernier, 3-0, c'est dur attendez un peu la saison prochaine. Ensuite, Vesoul est une ville discrète, très discrète même. Bien sûr, on n'y passe pas par hasard, on s'en doute, il faut le vouloir. Comme pour toutes les villes, on a construit autour une rocade qui permet de la contourner mais la rocade de Vesoul a ceci de particulier qu'elle forme une boucle gigantesque, interminable, comme si les urbanistes avaient prévu pour la ville une expansion démesurée qui se fait encore attendre. Ce qui fait que lorsqu'on va de Luxeuil-les-Bains à Besançon, on tourne autour de Vesoul pendant des kilomètres sans jamais l'apercevoir, c'est aussi long que si on contournait Philadelphie ou Manchester, et on en arrive à croire qu'en fait Vesoul n'existe pas. Pourtant, Vesoul existe, je le sais, j'y suis allé une fois, j'avais une fiancée dont le père habitait la place et il avait fallu un jour le visiter. J'avais acheté un beau stylo dans une librairie et le lendemain matin, un dimanche, l'ex-futur beau-père m'avait proposé de faire un petit tour à vélo. Petit tour mon oeil, vieux félon, ça s'était fini par l'ascension du Ballon d'Alsace, j'en avais bavé mais je n'avais pas calé, je voulais la fille, je l'ai eue, je l'ai perdue, elle m'a laissé un souvenir cuisant mais j'ai gardé le stylo.
Mais Blanchard. Blanchard vit et travaille à Vesoul, il s'occupe d'une galerie municipale où viennent exposer des artistes locaux. Blanchard écrit aussi, et surtout. Pas de fiction, des carnets. De ses carnets, il fait des volumes qu'il parvient même à faire éditer, ce qui n'est pas mal mais il faut voir comment. Après un premier volume paru au Dilettante en 1989 (Entre chien et loup, réédité en même temps que celui-ci), Blanchard s'est fait alpaguer par un éditeur régional, voire régionaliste, absolument pas versé dans la littérature et dont le diffuseur ne tarda pas à faire faillite. Ce qui fait qu'il faut s'accrocher pour dénicher un des quatre volumes de Blanchard parus entre les deux Dilettante. Comme si ça ne suffisait pas, Blanchard a longtemps refusé toute promotion, tout entretien, et bien sûr toute séance de signature, fût-ce pour trois ou quatre personnes. L'écriture, oui, le reste, le décorum, non. S'il a consenti à l'occasion de cette dernière livraison à un entretien au Matricule des anges, c'est du bout des lèvres, et s'il consentait un jour à une signature, il relaterait peut-être l'expérience avec le détachement, que j'admire, d'un Thierry Beinstingel retour du Salon du livre (http://perso.orange.fr/tb/etonnements.htm). Malgré ces obstacles, André Blanchard est lu et apprécié, il a ses fidèles, il a ses critiques, je suis d'ailleurs venu à lui par un article élogieux du Canard enchaîné.
André Blanchard écrit des carnets, pas un journal, il y tient : "Mes Carnets sont plus proches du recueil de moraliste et de chroniqueur que du journal, dont la raison d'être est de raconter des journées; moi, par le truchement des Carnets, je tâche au contraire d'oublier les journées en leur substituant de quoi exister sans les avoir à vivre. Et pour cela, j'y ai mis du mien en les liquidant d'avance, ces journées, en les vidant, en m'arrangeant pour que mon agenda, semaine après semaine, imite celui du roi un certain 14 juillet." Dans ces carnets, on trouve tout de même des notations sur son quotidien de gardien de galerie : "A la galerie, j'intercale quelques instants de lecture entre les visiteurs : hop, une page par-ci, deux par-là, c'est toujours ça que le temps perdu n'aura pas [...] d'où la dégringolade illico quand survient un visiteur qui, c'est courant, me demande de le rencarder sur n'importe quoi, s'il y a des toilettes ici, si je sais qui on enterre là en face à l'église, où se situe telle administration, et qui est-ce qui laisse traîner ses poubelles à longueur de journées là sur la trottoir, qu'est-ce que vous en pensez, c'est une calamité, y a plus de vie en commun possible, bientôt, non ?" Hors du quotidien, on trouve des réflexions sur la vie littéraire, des coups de griffe contre les têtes de turc de l'auteur (Michon, Ernaux, Bobin, bien d'autres), des commentaires sur le monde tel qu'il va, des exercices d'admiration pour des écrivains pas franchement dans le vent (Mauriac, Bernanos, Guéhenno, France), des notations philosophiques, la vie, la mort et le tremblement, des aphorismes... L'ensemble baigne dans ce que l'auteur appelle lui-même un spleen qui envahit de grisaille chaque parcelle de sa vie, mais aussi dans une aigreur moins noble, de celle que donne la petite ville et ses suffisances, on sait ce que c'est, on n'y échappe pas toujours soi-même. Si l'on compare avec les Carnets de notes d'un autre intransigeant, Pierre Bergounioux, on pense à lui parce qu'on le lisait ici à la même époque l'an passé, on n'est tout de même pas à la même hauteur. Le lamento continuel agace, les pirouettes par lesquelles l'auteur se sent obligé de conclure ses notations, le plus souvent bâties sur la polysémie d'un terme, ne voltigent pas bien haut ("Prenons tout à coeur. C'est lui qui flanchera le dernier"), les diatribes contre la hausse des prix, le sport, la télévision, l'enseignement, la religion sentent le propos de comptoir, les aphorismes bidons pullulent ("L'art, c'est ce qui nous tient et maintient en éveil").
Et pourtant, Blanchard accroche. Parce que Blanchard est un auteur vivant, enfin un, qui n'hésite pas à illustrer le mot de Céline : "Il faut mettre sa peau sur la table quand on écrit." Parce qu'il n'y a pas de pose, malgré les apparences. Parce que Blanchard fait partie de ces gens qui considèrent l'écriture comme autre chose qu'un passe-temps ou un moyen d'atteindre la gloriole, c'est une raison de vivre, ni plus ni moins. Chez ces gens-là, comme chantait l'autre qui s'y connaissait en Vesoul et en Vierzon, l'écriture est vécue comme un exercice respiratoire, un processus vital. On n'est pas chez ceux qui écrivent avec une plume de paon dont ils se parent ensuite le croupion pour se pavaner au milieu d'une basse-cour béate d'admiration. Blanchard accroche aussi parce qu'au-delà de l'attitude, le contenu vaut souvent le détour. Comme il est un peu ours, on l'a vite comparé à Léautaud, ce qui n'est pas d'un grand intérêt. En revanche, lire sous sa plume la recommandation de "ne pas dire en trois mots ce qui tiendrait en deux" et le constat "qu'il est plus difficile d'écrire clair qu'obscur", ça c'est intéressant parce que c'est le genre de phrase qu'on trouve fréquemment dans le Journal littéraire. Blanchard manifeste aussi un certain talent pour flairer l'air du temps. Ainsi d'Anne Wiazemski : "Dans les années soixante, de qui se réclamait-elle ? De Godard, en tant qu'égérie devant la caméra, et épouse derrière; aujourd'hui, qui met-elle en exergue à tout bout de champ ? - Mon grand-père, François Mauriac... Cette filiation, qui était une tare il y a trente ans, est devenue chose prestigieuse." Intéressante aussi cette remarque comme quoi les grands livres se méritent : "A rebours des romanciers au petit pied, si peu sûrs d'eux qu'ils veulent accrocher dès la première page en redoublant les oeillades, l'auteur [d'un livre de poids, Stendhal, Cohen, Balzac ou Thomas Bernhard sont cités] place au départ une sorte de barrage, une vingtaine de pages denses et revêches, de quoi se foutre de ceux qui prennent la littérature pour passe-temps et les houspiller." Blanchard avoue d'ailleurs avoir agi de même dans l'ouverture de son précédent recueil : "Qu'elles [les trente premières pages] soient compactes et fassent comme un barrage, une sélection à l'entrée, c'est exprès : on n'est pas dans un moulin, me suive qui en a vu d'autres. Bref : - Au piquet le grand public." Des notations intéressantes, il y en a d'autres, sur Proust meilleur allié de Céline par exemple, comme il y a quelques images, quelques saillies qui font mouche... Au total, on ne regrette pas la visite et on risque de se mettre à chercher les carnets précédents, même si l'entreprise n'a rien de facile. De toute façon, Blanchard ne nous regrettera pas : "Que nos lecteurs, ce peuple de l'ombre, y restent."

JEUDI 2.
Lecture. Taïpi (Typee : A Peep at Polynesian Life During a Four Months' Residence in a Valley of the Marquesas, Herman Melville, Wiley & Putnam, New York, 1846; texte traduit par Théo Varlet et Francis Ledoux, revu par Philippe Jaworski, présenté par Michel Imbert et annoté par Philippe Jaworski, in Oeuvres I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 433; 1432 p., s.p.m.)
"Aperçu de la vie en Polynésie durant un séjour de quatre mois dans une vallée des Marquises"
Il faudra bien que j'en arrive un jour à la lecture de Moby Dick et, pour y parvenir, j'ai choisi d'attaquer Melville par le versant chronologique, en commençant donc par la trilogie polynésienne dont Taïpi est le premier volet. L'auteur n'a que vingt-sept ans au moment de la publication mais il a déjà vécu, suffisamment en tout cas pour nourrir ce récit de son expérience personnelle. Son héros, Tom, est marin sur un baleinier et profite d'une halte dans la baie de Taiohae, à Nuku-Hiva, pour déserter en compagnie d'un camarade de bord, Toby. Les deux hommes sont capturés par les Taïpis, une peuplade réputée cannibale, Toby réussit à s'enfuir et Tom est retenu comme otage plus ou moins consentant pendant quatre mois. Pour raconter cette histoire, Melville n'a eu qu'à puiser dans son récent passé de marin déserteur prisonnier des Taïpis en gonflant un peu la réalité sur le plan temporel puisque son séjour ne dura en réalité qu'un petit mois.
La structure du livre est très simple, deux épisodes d'aventures (la désertion et la capture d'un côté, l'évasion de l'autre) encadrent un long développement ethnologique dans lequel le narrateur décrit, au fur et à mesure qu'il les découvre sans toujours les comprendre, les moeurs des Taïpis. C'est une littérature que je ne connais absolument pas, les voyages, l'ethnologie, Loti, Segalen pour ce qui est de cette région, je n'ai jamais pratiqué et je découvre avec enchantement. Les longs développements du narrateur sur les différents aspects de la vie polynésienne ne suscitent pas l'ennui que je redoutais. Melville, pour cela, a l'habileté d'utiliser un narrateur qui ne comprend pas toujours ce qui se passe sous ses yeux et auquel le lecteur peut facilement s'identifier. En outre, il y a la menace du cannibalisme qui pèse sur toute l'histoire, et qui commande d'être attentif au moindre signe de menace.
Melville accompagne son histoire d'un volet politique dans lequel il prend fermement position contre le colonialisme militaire et religieux. Sa peinture du sauvage et de son mode de vie naturel non perverti par une culture étrangère s'inscrit dans une tradition littéraire qui va de Montaigne à Rousseau en passant par Shakespeare et Swift. Elle est d'autant plus précieuse qu'elle est ici donnée pour la dernière fois : les Français, les Anglais et les Américains sont en train de prendre possession de la Polynésie, l'Eden est en sursis.
Curiosité. On est rassuré : l'arbre à pain pousse dans les îles Sandwich.
Citation 1. "A moins qu'il n'y eût une fête spéciale, les hôtes de la case Maaheiao regagnaient leurs nattes assez tôt dans la soirée; mais non pas pour la nuit, car après avoir sommeillé quelque temps, ils se relevaient, rallumaient les chandelles, prenaient le troisième et dernier repas de la journée, où ne figurait que le popoï; et puis, après avoir inhalé une bouffée soporifique de tabac, se préparaient à la grande affaire de la nuit : dormir. On pourrait presque dire que c'est là, chez les Marquisiens, la principale occupation de la vie, car ils passent dans les bras de Morphée une partie considérable de leur temps. La vigueur naturelle de leur constitution n'apparaît nulle part avec plus de relief que dans la dose de sommeil qu'ils peuvent supporter. Pour beaucoup d'entre eux, en effet, la vie n'est guère autre chose qu'un somme voluptueux et souvent interrompu."
Citation 2. "C'est un trait particulier de ces peuplades, lorsqu'elles s'occupent à quelque travail, de le faire considérablement valoir. Ces gens ont si peu l'occasion de se donner du mal que, lorsqu'ils s'appliquent à quelque chose, ils semblent estimer qu'un acte aussi méritoire ne saurait échapper à l'attention de personne dans les environs. Si, par exemple, ils ont à déplacer quelque pierre à une certaine distance, ce qui pourrait être fait par deux hommes robustes, il s'en assemble toute une horde; après force palabres, ils la soulèvent à eux tous, chacun bataillant de son côté pour y trouver prise, et la transportent en hurlant en haletant comme s'ils accomplissaient quelque exploit remarquable. Quand on les voit ainsi, on ne peut se retenir de penser à une légion de fourmis noires rassemblées pour traîner vers quelque trou la patte d'une mouche morte."

SAMEDI 2.
Voyage retour. Nous remontons vers le soleil et la chaleur qui se sont réfugiés dans le nord. Lors de la halte pour la croûte dans une cantine autoroutière, Lucie, désormais rompue à la chose, va se piquer dans les toilettes comme une junkie chevronnée.

Bon dimanche.

 

Notules dominicales de culture domestique n°303 - 22 avril 2007

DIMANCHE.
Retour aux affaires. Les enregistrements télévisés soigneusement programmés (The Shield, Les Soprano, Suspect n° 1) ont tous lamentablement échoué. On devrait s'en sortir avec les rediffusions. On nous écrit de Pompéi, de Londres, de l'Aveyron. Les paquets plus volumineux contiennent la suite enregistrée des lettres de Chabrier lues par Claude Piéplu (qui promettent des trajets professionnels un peu moins lugubres demain matin), le dernier numéro des Cahiers du Collège de 'Pataphysique, où il est question d'onomastique capillicole dans un esprit pas très éloigné de celui de l'Invent'Hair, et le nouvel opus de Claude Daubercies. La boîte à lettres électronique s'enorgueillit d'accueillir son premier spam. La presse locale amassée pendant notre absence bruit de la visite de Ségolène Royal dans ses Vosges d'enfance où on oublie que Chamagne fut avant tout le village natal de Claude Gellée.

TV.
Les Soprano (série américaine de David Chase, avec James Gandolfini, Edie Falco, Lorraine Bracco; saison 5, épisode ?, saison 6, épisode 1, diffusés le 5 avril sur Jimmy).
Avant de lancer la dernière saison de la meilleure série de tous les temps, Jimmy offre une piqûre de rappel avec la rediffusion du dernier épisode de la précédente. D'ailleurs, le premier épisode de la nouvelle, on l'avait déjà vu aussi, je ne sais plus quand, en avant-première. Ca n'a aucune importance, je crois que je pourrais regarder Les Soprano en boucle sans jamais me lasser.

LUNDI.
Courriel. Echange grammatical avec LL, infatigable et rigoureuse correctrice des notules, sur l'accord de "tel". Fallait-il écrire "Le TGV, tel une Manaudou sur rails" ou "Le TGV, telle une Manaudou sur rails" ? Deux écoles s'affrontent.

TV. Les Soprano (série américaine de David Chase, 2006, avec James Gandolfini, Edie Falco, Lorraine Bracco; saison 6, épisode 2, diffusé le 5 avril sur Jimmy).

MARDI.
TV. Football. FC Montceau-les-Mines - FC Sochaux - Montbéliard 0 - 0 (0 - 2 après prolongations), en direct sur Eurosport.
C'est ça le charme de la Coupe de France, c'est quand le gros bouffe le petit.

Lecture. Une affaire judiciaire (Det som er mitt, Anne Holt; J.W. Cappelens Forlag a.s., 2001, Plon, coll. Policier, 2007 pour la traduction française, traduit du norvégien par Alex Fouillet; 336 p., 20 €).
"Une enquête de Vik et Stubo"
On n'avait pas suivi Anne Holt après ses débuts honnêtes chez Odin dans La déesse aveugle. Deux autre livres ont été traduits depuis et celui-ci entame une série dont les protagonistes sont Inger Johanna Vik, juriste et psychologue, et Yngvar Stubo, inspecteur principal à Oslo dont les méthodes intuitives rappellent davantage le commissaire Adamsberg héros des polars de Fred Vargas que ses collègues scandinaves Erlendur et Wallander. Deux histoires s'entremêlent dès le départ dans ce roman : celle d'un présumé assassin d'enfant condamné à tort dans les années 1960 réfugié aux Etats-Unis après sa libération et celle, contemporaine, d'un autre assassin du même type, pas du tout présumé et bien réel celui-ci. Anne Holt réunit ces deux parcours apparemment inconciliables dans un final très étonnant au prix d'une construction rigoureuse qui démontre un réel savoir-faire. On peut aussi remarquer son souci de mettre en scène les travers du système judiciaire norvégien, déjà présent La déesse aveugle, alors que la dame fut ministre de la Justice de son pays. La seule faiblesse de l'affaire est le rôle de profileuse qu'elle fait tenir à Inger Johanna Vik. Avec les hackers de l'informatique, les profileurs venus des romans américains, Le silence des agneaux en tête, constituent la plaie des romans policiers de notre temps.

MERCREDI.
Emplettes. J'achète un polar américain, un précis de poésie contemporaine, des salades à repiquer et deux chaussures destinées à remplacer celles qui, l'été dernier, tombèrent au champ d'honneur halieutique dans un étang bourbeux de Haute-Vienne, avec celui qui les avait chaussées.

TV. Les Soprano (série américaine de David Chase, 2006, avec James Gandolfini, Edie Falco, Lorraine Bracco; saison 6, épisodes 3 & 4, diffusés le 12 avril sur Jimmy).

JEUDI.
TV. Les Soprano (série américaine de David Chase, 2006, avec James Gandolfini, Edie Falco, Lorraine Bracco; saison 6, épisodes 5 & 6, diffusés le soir même sur Jimmy).
A jour !

Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.

VENDREDI.
Vie littéraire. Je réponds physiquement à une invitation concernant la constitution d'un association littéraire locale. Il n'y a pas grand monde au Centre culturel qui doit abriter les débats. Si peu de monde, personne en vérité, qu'on n'a même pas daigné en ouvrir les portes. Me serais-je trompé d'heure ? Je vérifie sur le courrier. Non, c'est bien vingt heures. Le vendredi 27 avril.

TV. Football. Amiens - FC Metz 0 - 2, en direct sur Eurosport.
Cette fois c'est fait, Metz retourne en première division après une année de purgatoire. Où la place est toute chaude pour l'AS Nancy-Lorraine.

SAMEDI.
TV. The Shield (série américaine de Shawn Ryan, 2006 avec Michael Chiklis, CCH Pounder, Forest Whitaker, Catherine Dent, Benito Martinez, Walton Goggins, Onahoua Rodriguez; saison 6, épisodes 2 & 3 diffusés le 12 avril sur Canal +).

Lecture. Vous, Marcel Proust (Lina Lachgar, La Différence, coll. Littérature, 2007, 160 p., 15 €).
"Journal imaginaire de Céleste Albaret"
Compte rendu à rédiger pour Histoires littéraires.

Bon dimanche.

 

Notules dominicales de culture domestique n°304 - 29 avril 2007

DIMANCHE.
Scène de square. Ce matin, à l'heure du jogging obligatoire, je paresse au soleil sur un banc, en un lieu où il y a des familles. Je chope, pas par hasard, je suis à l'affût de ce genre de chose, un échange entre deux couples qui viennent de s'apercevoir que leurs rejetons portent le même prénom. Et pas celui de n'importe qui apparemment : "Même la pédiatre nous a dit qu'elle n'en avait jamais rencontré !" Malgré de savantes manoeuvres d'approche, je ne parviendrai pas à saisir le fameux prénom, qui devait valoir son pesant de suffisance, mais je me régale de la conversation d'autant plus aisément que celle-ci est menée sur le mode claironnant. On sent que s'instaure entre les participants une complicité indéfectible, de la trempe de celles qu'on voit se nouer entre deux propriétaires de la même race de chien ("Et il a quel âge ?") ou de véhicule tout-terrain ("Et pour la consommation ?"). Le sujet est riche, les prénoms à travers les âges, "j'ai connu des Victoire - à moins que ce ne soient des victoires mais la dame n'a pas l'air belliqueuse - quand j'avais quinze ans". C'est très instructif, on est là chez des personnes qui considéreraient de la plus haute infamie de donner à leurs bambins des noms qu'on trouve sur le calendrier. Comme dans d'autres domaines, il s'agit d'être absolument original sous peine de passer pour un ringard, ce qui conduit à de délicieuses trouvailles, parfois réussies, parfois aussi biscornues que ridicules. Le fait n'est pas nouveau, qu'on se rappelle les tourments de Madame Bovary : "Pendant sa convalescence, elle s'occupa beaucoup à chercher un nom pour sa fille. D'abord elle passa en revue tous ceux qui avaient des terminaisons italiennes, tels que Clara, Louisa, Amanda, Atala; elle aimait assez Galsuinde, plus encore Yseut ou Léocaldie..." et on peut penser que c'est le même souci de se démarquer du vulgum pecus, la même volonté d'accoler une étiquette unique sur un être unique qui a guidé, aux siècles derniers, les parents d'Agricol Perdiguier, de Thémiseul de Saint-Hyacinthe ou de Népomucène Lemercier.

Journée "Que choisir ?".

LUNDI.
TV scolaire. Un sac de billes (Jacques Doillon, France, 1975 avec Richard Constantini, Paul-Eric Shulmann, Joseph Goldenberg. DVD MK2).

TV. The Shield (série américaine de Shawn Ryan, 2006 avec Michael Chiklis, CCH Pounder, Forest Whitaker, Catherine Dent, Benito Martinez, Walton Goggins, Onahoua Rodriguez; saison 6, épisodes 4 & 5 diffusés le 19 avril sur Canal +).

MARDI.
Vie musicale. Le centre social de Saint-Laurent, là où l'on vota inutile dimanche, abrite ce soir un concert de musique irlandaise. Pas des musiciens irlandais, des locaux, qui aiment cette musique et la travaillent chaque semaine dans divers ateliers. Certains avec lesquels j'ai déjà pratiqué, Super D., 3 834 bals folk au compteur et toujours aussi mauvais au bodhran, et surtout OB, qui fit partie depuis l'origine de l'aventure Garlamb'Hic. Notamment de son épisode irlandais : un marchand de voyages nous avait engagés pour animer quelques soirées auxquelles il avait invité ses clients. Soirée irlandaise, film, photos, discours, et nous pour la musique. Le premier soir, la salle de la Rotonde à Thaon-les-Vosges, un monde fou, pas loin de mille personnes peut-être. Il faut dire qu'il y avait des voyages à gagner, les gens étaient venus pour ça, ça s'est vu très vite : une fois le dernier cadeau attribué, tout le monde a sacré son camp pendant que nous continuions tant bien que mal à enfiler nos berceuses au milieu des claquements de fauteuils. Jamais vu une salle se vider aussi vite, c'était impressionnant. Après il y eut un ou deux concerts à Reims sur le même thème, une épopée sur laquelle il y aurait aussi à raconter. Au final, le voyagiste était content, il avait vendu des séjours, il était satisfait de nous, nous avions rempli le contrat. On lui avait demandé ce qu'il envisageait comme destination pour l'année suivante. La Grèce ? Pas de problème, on serait là. X. avait appris le violon, enfin des rudiments, en quatre semaines pour irlandiser un brin notre répertoire, ce n'est pas le bouzouki qui allait lui faire peur... Mais nous n'avons jamais eu de nouvelles et les costumes d'evzones sont restés dans les armoires.

MERCREDI.

Emplettes. J'achète le Ducasse de Jean-Jacques Lefrère, un petit livre sur Buffon et de quoi m'occuper dans le jardin l'après-midi.

JEUDI.
TV. Les Soprano (série américaine de David Chase, 2006, avec James Gandolfini, Edie Falco, Lorraine Bracco; saison 6, épisodes 7 & 8, diffusés le soir même sur Jimmy).

VENDREDI.

Cinéma scolaire. Je prends le bus pour Epinal avec une classe. Nous sommes attendus pour une séance dans le cadre de l'opération Collège au cinéma. C'est du moins ce que je crois, oubliant ma propension à me cogner fréquemment à des portes closes ces jours-ci. C'est encore le cas aujourd'hui. Je sonne et parviens à entrer tout de même à l'intérieur de l'établissement. Nous sommes bien attendus, mais le 8 juin. Le directeur dit que c'est l'administration qui s'est trompée, au collège les représentants de ladite administration diront bien sûr le contraire. Moi je m'en fous des responsabilités de chacun, je suis au milieu des deux instances responsables avec vingt-cinq gamins dont je ne sais que faire mais aussi l'agréable sensation que procure un peu d'inattendu dans le ronron scolaire. La première chose à ne pas faire, c'est de repartir au bus, le chauffeur serait bien capable de nous reconduire au bahut où on nous recollerait en cours. Profiter de l'imprévu, du beau temps, du loisir, c'est ça qu'il faut. Nous nous offrons une longue balade le nez au vent dans les rues et les parcs de la ville, les garçons sifflent les filles, les filles ont mal aux pieds, monsieur on peut s'acheter des kebabs, monsieur on peut s'acheter des glaces, tout le monde est presque aussi heureux que moi et nous retrouvons le bus à l'heure prévue pour le retour. Collège au cinéma, c'est bien mieux sans collège et sans cinéma.

TV. The Shield (série américaine de Shawn Ryan, 2006 avec Michael Chiklis, CCH Pounder, Forest Whitaker, Catherine Dent, Benito Martinez, Walton Goggins, Onahoua Rodriguez; saison 6, épisodes 6 & 7 diffusés la veille sur Canal +).

SAMEDI.
Football. SA Epinal - RC Strasbourg (B) 1 - 0.
Pour une fois, le SAS assure son maintien en CFA avant la dernière journée. Mon soulagement est immense.

Bon dimanche.