Notules dominicales 2010
 
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Notules dominicales de culture domestique n°457 - 15 août 2010

DIMANCHE.
Football. AS Nancy-Lorraine - FC Metz 2 - 0. C'est la finale du challenge Philippe Schuth, qui se tient cette année à Epinal. Un match amical, donc. C'est sans doute la raison pour laquelle on a droit, contrairement à ce qui se passe pour les humbles matches officiels de l'équipe locale, aux stadiers, aux policiers, aux vigiles et à la fouille. On n'aimerait pas vivre des choses semblables à chaque fois. Vivement que le début du championnat nous rende nos audiences et ambiances confidentielles.

Vie informatique. Je reçois les premiers messages d'une liste de diffusion à laquelle je me suis inscrit ce matin, la liste ANPR (A ne pas rater), à moi signalée par le notulien ST, seul supporter du SAS football recensé dans les Alpes-Maritimes. Il s'agit d'un groupe dont la noble activité consiste à rendre disponibles des fichiers gratuits, libres et faciles d'accès d'émissions de radio (France Culture pour l'essentiel) hors d'atteinte par les voies du podcast habituel. J'ai pu ainsi par exemple, écouter aujourd'hui et archiver Sami Frey dans son Je me souviens enregistré au Festival d'Avignon 1988. Les messages pleuvent, certains sont trop techniques pour un notulographe moyennement versé dans la chose informatique mais beaucoup proposent simplement un lien qui envoie sur une émission disponible. Je ne sais comment les contributeurs se procurent les fichiers, s'ils transposent des bandes magnétiques où s'ils écument l'INA, mais ça marche et c'est riche. Je vais pouvoir bazarder quelques kilos de cassettes et demander au Très-Haut d'augmenter la durée des jours et des nuits pour pouvoir écouter tout ça. Renseignements plus précis seront donnés en privé aux notuliens intéressés.

Lecture. Une douce flamme (A Quiet Flame, Philip Kerr, Quercus, 2008 pour la version originale, éditions du Masque pour la version française, traduit de l'anglais par Marie-Caroline Aubert; 432 p., 22 €).
Où l'on retrouve Bernie Gunther, héros de la Trilogie berlinoise et de La mort, entre autres à Buenos Aires en 1950. Après avoir décrit dans ses trois premiers livres la montée du nazisme en Allemagne, Philip Kerr s'attache désormais à ses suites. Nombre de tortionnaires du régime ont trouvé refuge en Argentine et Gunther recherche parmi ceux-ci un tueur de jeunes filles susceptible d'avoir exercé ses talents des deux côtés de l'Atlantique. On a rapproché, ici même, le travail de reconstitution historique de Philip Kerr sur l'Allemagne nazie de celui de Stuart Kaminsky sur le Hollywood des années 40. En fait les enjeux sont un peu différents d'un auteur à l'autre. Se coltiner, comme le fait Toby Peters, avec Judy Garland ou Clark Gable n'est pas tout à fait la même chose que croiser sur sa route des gens comme Adolf Eichmann, Josef Mengele ou le couple Peron qui logent dans ce livre. Les intrigues ne sont pas non plus à la même échelle : là où Peters met fin aux agissements de quelques méchants qui hantent le milieu du cinéma, Bernie Gunther découvre les restes d'un camp d'extermination en pleine pampa argentine. Par ailleurs, Toby Peters, privé ordinaire, n'a pas le même vécu que Gunther qui a fait partie de la SS et qui, pour cette raison, rend le travail de Kerr particulièrement délicat : comment en effet parvenir - et il y parvient - à rendre sympathique aux yeux du lecteur un personnage possédant un tel passé ? Là où les deux auteurs se rejoignent, c'est dans la minutie du travail de reconstitution, et surtout dans la manière de raconter leurs histoires, leur écriture pleine de trouvailles, d'expressions et d'images qui font mouche à chaque fois. Le plaisir de lecture est équivalent d'un auteur à l'autre mais, encore une fois, Philip Kerr présente dans ses romans des enjeux d'une taille autre que ceux de son collègue.

MARDI.
Vie liturgique. Cet après-midi, en l'église de Saulcy-sur-Meurthe, l'obligation statutaire qui conduit le notulographe à accompagner, dans la mesure de son rayonnement géographique, les notuliens frappés par le deuil, se conjugue au voeu sincère de manifester sa sympathie à quelqu'un dont on apprécie l'amicale présence dans les moments importants (au bistrot) aussi bien que futiles (au boulot).

SAMEDI.
Transhumance. En route pour la Creuse. Une seule source d'appréhension : que mes asticots et mes vers se fassent la belle dans la glacière, ce qui ne se produira pas. A partir d'aujourd'hui, do not disturb, je suis à la pêche.

IPAD. 11 novembre 2008. 37 km. (8923 km).


887 habitants

Sur le mur du cimetière, une plaque verte signale la présence de "Tombes de guerre du Commonwealth/Commonwealth War Graves". Le monument, une petite stèle grise, est à l’entrée, avec quatre drapeaux et la gerbe du matin entourée d’un ruban tricolore ("Communes de Renauvoid-Chaumousey-Sanchey") en provenance de la maison Merlino, 4 quai des Bons-Enfants à Epinal.

Face :

A nos morts pour la France

1914-1918

CHAUMOUSEY

CAMUS Georges

CUNY André

GRANDMAIRE Emile

MALGLAIVE Edmond

ROYER Georges

THOMAS Georges

VUILLEMIN Pierre

Gauche :

RENAUVOID

BLAUDEZ Albert

BRIOT Roger

CARRETTE Louis

CAUVE Justin

CHARLES Louis

GERARDIN Joseph

GRANDMAIRE Charles

Dos :

1939-1945

THIRIAT Léon

LURION Paul

LACAILLE Pierrette

THEVENARD Raymond

VAUTHIER Henri

Droite :

SANCHEY

CHRETIEN. C MORTAL. L

CONRAUX. D PILGRAIN. H

DENIS. J RUESCHER. A

DUHOUX. R THOMAS. M

GEHIN. R VAUTHIER. A

LEMARQUIS. E VAUTHIER. L

MELINE. P

On remarquera la bizarrerie qui consiste à placer un point derrière le nom de famille plutôt que derrière l’initiale du prénom. Pour un peu, les Poilus de Sanchey étaient pourvus d’une adresse e-mail.

En contrebas, sous un drapeau canadien, six tombes sont alignées. Il s’agit de cinq membres de la Royal Air Force et d’un membre de la Canadian Air Force, tous tombés le 29 juillet 1944.

L'Invent'Hair perd ses poils.


Salaise-sur-Sanne (Isère), photo de Marc-Gabriel Malfant, 17 mars 2007

A rapprocher du Révolu'Tif de Sainte-Cécile-des-Vignes présenté dans les notules 408.

DIMANCHE.

Lecture. Mourir pour des idées. La vie posthume d'Alphonse Baudin (Alain Garrigou, Les Belles Lettres, coll. L'histoire de profil, 2010; 312 p., 27 €).

Biographie. Alphonse Baudin fait partie des figures célébrées par Eric Hazan dans son Invention de Paris récemment découverte. Une figure qui apparaît, pour disparaître aussitôt ou presque, le 3 décembre 1851, sur une barricade du faubourg Saint-Antoine. Ce jour-là, après avoir appelé les ouvriers du faubourg à se joindre aux élus pour combattre le coup d'Etat de Louis Napoléon Bonaparte, Baudin tombe sous les balles de la troupe appelée pour vaincre l'insurrection naissante. Voilà pour les faits. Parce qu'au-delà des faits, il y a des mots. En ce temps-là, les députés, et Baudin était député, touchaient une indemnité de vingt-cinq francs par jour. Un ouvrier - une ouvrière ? - lance à Baudin : "Est-ce que vous croyez que nous allons nous faire tuer pour vous conserver vos vingt-cinq francs ?", Baudin réplique : "Vous allez voir comment on meurt pour vingt-cinq francs", monte sur la barricade, et meurt. Le mot, le mot sublime est lancé, il fera florès. Sans ça, pas de Baudin. Comme l'écrit Garrigou, "sa mort était devenue la vraie naissance, une naissance héroïque". La biographie qu'il propose ne concerne donc que la postérité de Baudin, puisque Baudin, obscur parlementaire de Nantua, n'exista que par sa fin tragique. Grâce à celle-ci, il devient le modèle du héros civique, façonné par les récits des proscrits de décembre, Victor Schoelcher et Victor Hugo en tête. Sa tombe devient un lieu de pèlerinage, Larousse lui consacre un article de son dictionnaire en 1867, une souscription est lancée pour lui ériger un monument en 1868, il entre dans tous les manuels d'éducation civique puis au Panthéon en 1889, sa statue voit le jour en 1901 : "Ce nom, hier encore inconnu, est aujourd'hui le plus populaire de France", dit un journal de l'époque. Ce n'est plus vraiment le cas aujourd'hui mais le travail d'Alain Garrigou permet de tracer des parallèles : les vingt-cinq francs de Baudin brillent d'un singulier éclat sous les feux des milliards des Bettencourt. Les débats parlementaires reproduits ici, reflets d'un temps où le politique (les idées) n'avait pas abdiqué devant l'économique (l'intérêt, "l'eau glaciale du calcul égoïste" de Marx), les articles de presse de l'époque, une presse engagée, tonnante (dont on comprend que les pouvoirs du moment aient voulu la museler, quel pouvoir, aujourd'hui, voudrait museler Libération ?) donnent un piètre image de notre temps. Garrigou ne s'arrête pas à l'étude du cas Baudin : il élargit son propos en examinant les notions d'héroïsme, de courage et de sacrifice, en cherchant d'éventuels successeurs à la victime de 1851. Il annonce que nous sommes entrés dans une ère d'histoire sans héros, ou avec des héros différents : on parlait auparavant du courage de ceux qui se battaient pour obtenir quelque chose, on parle aujourd'hui du courage de ceux qui acceptent de perdre quelque chose (une part de salaire, un droit, un "avantage acquis", un âge de retraite...) : "Par une ruse singulière, le courage embellit les sacrifices que les puissants demandent aux faibles pour justifier leur dépossession : il en faudrait pour perdre des droits et non plus pour les conquérir. Et, s'ils refusent d'acquiescer benoîtement aux injonctions de l'autorité, on accuse la peur devant les changements et le stupide refus de la nécessité."

LUNDI.

Lecture. Rimbaud le fils (Pierre Michon, Gallimard, coll. L'un et l'autre, 1991; 128 p., 87 F). Ça carbure dur chez Michon à cette époque. 1988 Joseph Roulin, 1989 L'Empereur d'Occident, 1990 Maîtres et serviteurs, 1991 Rimbaud. Bon an mal an, Michon pond. C'est comme si les Vies minuscules, longtemps retenues, avaient lâché la bonde. C'est d'ailleurs la même eau qui s'échappe depuis Vies minuscules, le sujet n'y change rien, c'est toujours le même flux, le même courant porté par cette écriture tellurique, secousses comprises, qui, quoi qu'il arrive vaudra à Michon le statut de classique. Ce n'est pas parce qu'il s'attaque à Rimbaud qu'il va changer sa façon de faire. En avant donc pour un portrait, un de plus, mêlant les événements avérés et les scènes imaginées bardées de prétéritions : il faudra un jour compter les "on dit que", "à ce qu'on dit", "ou peut-être", "c'est ce qu'on veut croire" chez Michon où même les "j'en suis sûr" ne reposent sur rien de réel. Rimbaud donc, qui échappe à une vie minuscule - après tout, les Ardennes de 1870 valent bien la Creuse - par une série de circonstances, de rencontres, d'événements : le père enfui et la mère "souffrante et mauvaise" comme point de départ déterminant - Rimbaud, le fils, ne perdons pas le titre de vue -, Izambard, Banville, Verlaine, Carjat qui ont droit chacun à leur chapitre, et puis les autres, Fantin-Latour, Bardey, Ménélik, plein d'autres, y compris "six Noirs abyssins sans nom portant une litière sur le dos", mêlés dans un final de feu d'artifice qui dit l'impossibilité de saisir tout ou partie de Rimbaud, être et mythe mêlés. Michon aura essayé, il se sera cru, à certains moments, au-dessus de "tous ces livres écrits sur Rimbaud, ce livre unique en somme tant ils sont le même", il se sera vu, un instant, capable de traiter d'égal à égal avec son sujet, à deux doigts de tutoyer l'Arthur. D'autres viendront, d'autres essaieront. Michon sera passé par là avant eux. Leur chemin ne sera pas facile.

MERCREDI.

Lecture. A l'ouest rien de nouveau (Im Western nichts Neues, Erich Maria Remarque, Stock, 1929 pour la version française, rééd. coll. La Cosmopolite, 2009, traduit de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac; 288 p., 18,50 €). Le livre se révèle d'une construction un peu plus complexe que le film de Lewis Milestone, qui date de 1930 et propose un déroulement strictement chronologique. Remarque fait commencer son roman sur le front, en 1917, et ce n'est qu'au cours de plusieurs retours en arrière que l'on découvre le passé du héros et de ses camarades. Autre différence, la séquence d'ouverture du film, le discours patriotique du professeur Kantorek n'existe pas chez Remarque. A part ces détails, la fidélité de Milestone à l'esprit du roman est remarquable, dans sa volonté de s'attacher à un groupe plutôt qu'à un individu, dans sa description réaliste des scènes de combat et dans son engagement pacifiste. Erich Maria Remarque, mobilisé à l'âge de 18 ans, sait ce dont il parle. Les soldats qu'il décrit n'ont pas vingt ans et représentent une génération sacrifiée. Ce qui est remarquable, c'est qu'il n'y a aucune ligne, aucun mot qui soit dirigé contre l'ennemi, même dans les paroles des soldats : "C'est un ordre qui a fait de ces formes silencieuses nos ennemis; un autre ordre pourrait maintenant faire d'elles, nos amis." L'auteur fait alterner les pages de monologue intérieur du narrateur, qui portent la partie idéologique du livre, avec des scènes d'action qui rassemblent les événements traditionnels de la guerre : les classes, l'attente, le front, le combat, la blessure, la permission, la mort. On évite donc le roman dogmatique lourdaud, ce qui explique le succès jamais démenti de l'oeuvre.

SAMEDI.

IPAD. 11 novembre 2008. 37 km. (8923 km).


1527 habitants

La composition occupe le centre d’un parterre circulaire en haut du village, à côté de la Mairie et face à l’église. Une stèle traditionnelle, ancienne, devance trois stèles modernes, des dalles verticales aux bords irréguliers, placées en arc de cercle. Ça ressemble à un monument recomposé suite à une délocalisation. La stèle centrale est dressée au milieu d’un carré agrémenté de plantes diverses, buis, pensées, etc. Deux drapeaux surplombent le tout. La gerbe du matin, due à la générosité de la "Municipalité de Chavelot", n’est plus sous cellophane, ce qui interdit d’en connaître la provenance.

La commune de Chavelot reconnaissante

A tous ceux de ses enfants

Morts pour la France

Dans la guerre du droit et de la liberté

Stèle de gauche :

Morts pour la France

Guerre de 1914-1918

1914

13 noms de COLLOT Eugène 12 noms de WAMBEVER Marcel

à MARCHAL Louis J. à JACQUOT Charles

1915

14 noms de MAIMBOURG Armand 11 noms d’AUBRY Edmond

à BAR Emile C. à THOUVENOT Henri

Stèle centrale :

Morts pour la France

Guerre de 1914-1918

1916

7 noms de CLAUDE Auguste 7 noms de JACQUEMIN Georges

à GUERCHOUX Charles à LARCHER Marie L.

1917

4 noms de LUTZLER Alexandre 3 noms de COLAS Jules F.

à DUHOUX Auguste à CHOSEROT Fernand

1918

7 noms de ROLLIN Joseph V. 7 noms de CHOSEROT Mathieu

à LHOTE Camille à COLIN Alfred

1919

MATHIEU Joseph

VILLEMIN Marie J.

Stèle de droite :

Morts pour la France

Guerre de 1939-1945

11 noms et dates de FEUERSTEIN Maurice 21.03.1940

à RAPPENNE Gérard 09.04.1945

Guerre d’Indochine

PERRARD Georges 21.11.1948

Ces trois stèles ont été inaugurées le 11 novembre 1997

Par Mr Robert BRESSON

Conseiller Régional de LORRAINE

Maire de CHAVELOT

En présence du Conseil Municipal

Et des enfants des Ecoles

L'Invent'Hair perd ses poils.


Décines (Rhône), photo de Marc-Gabriel Malfant, 1er avril 2007

JEUDI.

Lecture. Crime et châtiment (Fédor Dostoïevski, 1867, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 83, 1950; traduction et notes par D. Ergaz; 1280 p., s.p.m.). A défaut de profiter des vacances pour réviser ses classiques, on peut toujours en découvrir. Les grands romans russes font un peu peur et c'est vrai qu'il faut les mériter. L'errance de Raskolnikov dans les bas-fonds de Saint-Pétersbourg, après ce crime qu'il avait selon lui le droit de commettre, ne va pas sans longueurs. Mais Dostoïevski, comme Gontcharov avec Oblomov, ne peut abandonner un personnage sans l'avoir entièrement décortiqué, sans l'avoir examiné sous toutes les coutures. Cet examen, plus que par l'analyse psychologique, passe par le dialogue : c'est au cours des conversations qu'il mène avec les divers protagonistes de l'histoire que Raskolnikov se dévoile. Conséquence de ce procédé, le roman accumule les phases statiques, les scènes au sens théâtral, et fige les acteurs, ce qui se retrouve un peu, me semble-t-il, dans les romans de Kafka. Mais au bout de ce lent dévoilement se trouve la récompense donnée au lecteur : un épilogue admirable qui raconte la rédemption et l'élévation de Raskolnikov, une fin qui, comme l'éloge funèbre rendu à Oblomov dans le roman de Gontcharov, porte l'oeuvre à des sommets insoupçonnés. Ce qui fait qu'un classique est un classique, en somme.
Curiosité. "Habituellement peu fréquenté, le boulevard à cette heure torride (il était une heure de l'après-midi environ) se trouvait tout à fait désert" (p. 88). Heure torride ? 33 degrés peut-être...

VENDREDI.

Vacances (fin). Je rentre de la pêche, ça a mordu, merci. A part ça ? Pas grand-chose, je dois dire. Il n'y a pas eu cette année de grand périple littéraire à la recherche de Michon ou de Bergounioux, même si l'on a retrouvé des traces fraîches de ce dernier dans une librairie d'Ussel. Il y a eu toutefois la Journée du livre à Felletin, quatre-vingts auteurs invités, quatre-vingts auteurs présents, j'étais heureux, j'en connaissais un, Raymond Poulidor, je l'ai pris en photo. Il y a eu l'écoute de la série Churchill et de la saga Sagan sur France Culture, ce que peut faire la radio quand elle se donne les moyens de travailler sur la durée. Il y a eu une invasion de vaches et une invasion de souris mais pas en même temps. Il aurait pu y avoir une énorme carpe mais j'étais monté trop fin. Il y a eu une partie de Cluedo, une seule, comme quoi le temps n'a pas été trop mauvais, d'ailleurs il n'y a même pas eu de puzzle entrepris. Il y a eu des baignades dans à peu près toutes les eaux du canton, il y a eu pour moi des séances de natation d'au moins cinquante mètres qui m'ont laissé pantelant sur le rivage. Il y a eu la pensée que ce séjour était peut-être notre dernier en ce lieu mais rien n'est moins sûr. Il y a eu des monuments aux morts, des salons de coiffure, des publicités peintes, des cafés fermés, donc il y a eu des photos mais pas trop, vacances obligent. Il a eu d'autre choses, pas trop non plus d'ailleurs, mais ça ne tiendrait pas sur une carte postale alors je préfère arrêter là.

SAMEDI.

IPAD. 23 novembre 2008. 96 km. (9019 km).


50 habitants

Au vu du nombre d’habitants, je ne fondais guère d’espoirs sur cette visite. Mais en apercevant, depuis l’entrée du village, une paire d’ailes dépassant d’un ensemble apparemment minéral, je me suis dit que ce devait être une Victoire, et que mon dimanche était sauvé. Je n’avais pas pris en compte l’inventivité décorative qui peut régner sous ces latitudes. En fait d’allégorie diptère, voilà ce que j’ai trouvé :

Un peu plus loin, je suis tombé sur le monument, une stèle miniature en pierre blanche, accotée à l’église. Elle est surmontée d’une croix, agrémentée d’une croix de guerre, d’une branche de chêne et d’une branche non identifiée entrecroisées et se tient au centre d’un enclos entouré d’une grille basse et de massifs de buis. Les deux drapeaux claquent au vent, il a neigé et ce n’est pas fini.

A nos morts

1914-1918

CHAUMONT Abel Champenoux 1914

JEANDEL Aimé N.D. de Lorette 1914

COLIN André Langemark 1914

MATHIEU Emile Nevers 1915

RAMBAUT André Dijon 1915

BOURGEOIS Henri Amiens 1915

Côté gauche :

CUNIN Emile Trouville 1915

MARCHAL Henri Tunnel des Tnes 1916 *

CHAUMONT Emile Mont-N.-Dame 1917

MARCHAL Emile Villers-Hélon 1918

* Probablement le tunnel de Tavannes, sur la ligne ferroviaire Metz-Verdun, qui servait de dépôt de munitions. 500 hommes y périrent le 4 septembre 1916 suite à l’explosion d’une grenade qui mit le feu aux poudres.

L'Invent'Hair perd ses poils.


Paris, rue Faidherbe, photo de l'auteur, 2 avril 2007

Bon dimanche.

 

Notules dominicales de culture domestique n°458 - 22 août 2010

DIMANCHE.
Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental. Retour aux dimanches ordinaires avec la recherche du monument aux morts de Dommartin-lès-Vallois.

LUNDI.
Vacances (à venir). "Il y a eu la pensée que ce séjour était peut-être notre dernier en ce lieu mais rien n'est moins sûr." Ca, c'était ce qu'on écrivait la semaine dernière. Aujourd'hui, le doute est levé : nous y retournerons.

MARDI.
Vie notulienne. J'ai à plusieurs reprises tenté de rédiger une typologie de la gent notulienne sans y parvenir de façon satisfaisante. On en trouve trace dans certains numéros où il est question de notuliens du premier cercle, de notuliens captifs, de notuliens égarés et autres catégories relevées au fil des ans. Aujourd'hui, je découvre chez JMD un rapide tracé en coupe de la notulie qui me semble beaucoup plus pertinent et plus adroit que tout ce que j'ai pu essayer de faire jusqu'à présent. J'en donne la teneur ci-dessous, non sans avoir précisé qu'il s'agit d'un extrait d'un article intitulé "Quels blogs pour quels lecteurs ?" dont je recommande la lecture intégrale : http://www.le-carnet-de-jimidi.com/article-quels-blogs-pour-quels-lecteurs-55512652.html

[...] C’est pourtant bien autour des questions liées à nos pratiques que s’organise ma réflexion, dont le déclic aura été de recevoir dimanche 15 août vers midi, dans ma boîte aux lettres électronique, adressée par Philipe Didion, les Notules dominicales de culture domestique n°457, dont la seule particularité pourtant, par rapport aux autres, était de parvenir aux abonnés trois semaines après les précédentes, du 25 juillet, marquant ainsi la fin d’une pause estivale qui n’avait que trop duré. [...]
Pour Philippe Didion au moins, la question de son blog est vite réglée : il lui sert de cave. Ses notules sont classées là par ordre chronologique, c’est un garçon méthodique, mais l’austérité du lieu montre assez au visiteur qu’en cette gare, il a raté le train. Car la meilleure façon de voyager en compagnie de ses notules hebdomadaires, c’est de s’abonner. Nous avons bien là une « newsletter », diffusée auprès d’une grossissante deux cent cinquantaine de destinataires consentants dans laquelle je connais au moins un mordu : moi, mais où l’on doit trouver tout un éventail, comprenant l’internaute décédé ne relevant plus sa boîte, celui ne sachant plus comment se désabonner, celui, un peu fainéant, parcourant la notule d’un oeil, le droit, puis du gauche la suivante, les membres du cercle professionnel et familial de l’auteur, dont maman, qui eux n’ont guère le choix, les lecturophages boulimiques qui, abonnés à tout, lisent tout et passent commande à leur retour en août des journaux quotidiens qu’ils ont ratés au camping en juillet, des notulophiles que cette lecture régulière ravit, parmi d’autres, des notulopathes aux extrémités tremblantes à l’idée qu’un jour tout ça puisse s’arrêter et le mordu déjà cité. [...]

VENDREDI.
Lecture. La leçon d'allemand (Deutschstune, Siegfried Lenz, Hoffmann und Campe Verlag, 1968 pour l'édition originale, Robert Laffont, coll. Pavillons, 1971 pour l'édition française; traduit de l'allemand par Bernard Kreiss; 468 p., 22,71 €).
Après la guerre, un jeune Allemand est enfermé dans un centre de rééducation à Hambourg. Puni pour avoir rendu copie blanche à une rédaction sur "Les joies du devoir" et condamné à l'isolement, il entreprend de faire de cette rédaction le récit de sa proche enfance. En 1943, âgé d'une dizaine d'années, il vivait dans un coin perdu du Schleswig-Holstein entre son père, policier local, et son ami, un peintre reconnu. Lorsque ce dernier se vit intimer l'ordre de cesser toute activité artistique par le régime nazi, c'est le policier qui fut chargé de faire respecter cette mesure.
Il y a un certain plaisir à trouver ici un vrai roman, une de ceux dans lesquels on se trouve bien, dont la lecture se fait sans hâte. On entend dire assez de mal du roman traditionnel pour ne pas essayer de le défendre quand on tombe sur un bon spécimen du genre. La leçon d'allemand exploite de façon optimale à peu près tous les ingrédients romanesques classiques : un cadre bien utilisé (les landes désertes de la mer du Nord), des personnages dont la richesse ne se dévoile que progressivement, un procédé narratif efficace (le récit dans le récit), un contexte historique sensible propre à influer sur les actes des protagonistes, un enjeu moral (l'amitié doit-elle s'effacer devant le devoir ?), une langue travaillée (celle d'un enfant qui n'utilise pas un langage enfantin), des scènes fortes qui font rebondir l'histoire. Il n' ya là rien de révolutionnaire mais suffisamment d'éléments pour faire de ce roman une oeuvre de qualité. Il ne manque qu'une chose : un éditeur à la hauteur, ce qui n'est pas le cas ici avec un texte mal imprimé et bourré de coquilles.

SAMEDI.
IPAD. 7 décembre 2008. 31 km. (9050 km).


1203 habitants

C’est une grande façade de granit gris adossée à une cour d’école, entre l’église (fermée) et la Mairie. Sur la partie centrale, une croix, une palme et un médaillon portant un coq, sur les parties latérales, une palme. Les lettres des noms ne sont pas gravées mais collées, des lettres grises sur un fond gris, difficiles à lire dans le soir qui tombe.

A ceux des nôtres

Qui sont morts pour nous

Grande Guerre

1914 – 1918

Gauche :

1914

ARNOULD Prosper DURUPT Jean

BAILLY Auguste GROSJEAN Jules

BAILLY Maurice MOUGENEL Georges

CHASSARD Paul PEROLA Joseph

CHRISTINE Eugène SHEROMME Arsène

DANIEL Henri THIRIET Ernest

1915

BONVIN Léon LALLEMENT Victor

BOURION Henri MARTINET Emile

COLIN Pierre NICOLLE Gabriel

DANIEL Louis PETRONIN Raymond

DURUPT Gaston RIVAT Paul

LEROY Prosper

Droite :

1916

AUBEL Louis JACOPIN Théodore

BAILLY Just PEROLA Edouard

BONVIN Emile REMY Albert

DOUCEY Edmond RIVAT Camille

GURY Eugène THIAVILLE Georges

HELMEUR Joseph

1918

BOURION Charles MATHIEU Séraphin

HOLVECK Emile MAXEL Léon

JACOPIN Paul GAUTHIER Jean

LALLEMENT Charles MOREL Adrien

MAURICE Aimé

En avancée, une plaque :

Aux victimes de la guerre

1939-1945

12 noms de DEMANGE Auguste à PIERRE Georges

Un peu à l’écart, une petite stèle récemment fleurie :

Aux combattants d’Afrique du nord

1952-1962

L'Invent'Hair perd ses poils.


Mandelieu-la-Napoule (Alpes-Maritimes), photo de l'auteur, 10 avril 2007

Bon dimanche.

 

Notules dominicales de culture domestique n°459 - 29 août 2010

JEUDI.
Lecture. L'Epouvantail (The Scarecrow, Michael Connelly, Little, Brown & Company, New York, 2009 pour l'édition originale; Le Seuil, coll. Policiers, 2010 pour la traduction française, traduit de l'américain par Robert Pépin; 512 p., 22,80 €).
Où l'on retrouve le journaliste Jack McEvoy, personnage principal du Poète, un Connelly datant de 1996, qui devient donc le troisième personnage récurrent de l'auteur après le flic Harry Bosch et l'avocat Mickey Haller. Autant le dire tout de suite, ses aventures n'ont pas la force de celles de ses concurrents. Le Poète, surnom d'un tueur en série traqué par McEvoy, souffrait d'une avalanche de rebondissements mécaniques dans sa dernière partie et cet Epouvantail n'atteint pas le niveau des meilleurs livres de son auteur. L'action a du mal à démarrer, il faut dire que Connelly prend son temps pour mettre en place un contexte qui lui tient à coeur. Ancien journaliste lui-même, il présente son confrère de papier le jour même où celui-ci est licencié du Los Angeles Times, ce qui lui donne l'occasion de s'attarder assez longuement sur la situation actuelle de la presse papier, cernée par l'omniprésence du Net et de la télévision et obligée de se séparer de ses éléments de valeur pour réduire les coûts. C'est en fait la partie la plus intéressante du livre car, soucieux de quitter son boulot sur un article historique, McEvoy va s'intéresser à un crime trop facilement classé qui va le mettre sur la piste d'un, je vous le donne en mille, tueur en série. A partir de là, le journaliste laisse la place au romancier, bon tricoteur d'intrigue, certes, mais un peu routinier sur cette affaire. Le tueur en série, profilé et traqué par les as du FBI, commence à devenir un rien fatigant. Certes, l'époque est à la production de masse, à l'efficacité industrielle mais le meurtre unique, bichonné amoureusement, artisanal, à l'anglaise a aussi ses charmes.

VENDREDI.
Lecture. Sympathie pour le fantôme (Michaël Ferrier, Gallimard, coll. L'Infini; 272 p., 17,90 €).
Francis Lemarque chantait "Mon copain de Pékin". Je pourrais tout aussi bien fredonner "Mon poteau de Tokyo" si je n'avais crainte d'apparaître trop familier à l'égard de Michaël Ferrier. Michaël Ferrier, comme le disent les quatrièmes de couverture, "vit à Tokyo où il enseigne la littérature." Il y fait en réalité bien d'autres choses qui nous sont révélées dans ce livre, mais il est aussi et surtout un membre de la diaspora notulo-perecquienne (on le trouvera très prochainement au sommaire du prochain numéro des Cahiers Georges Perec), un des rares notuliens du continent asiatique. Du Japon, il m'envoie ses livres - j'ai un peu honte, je ne les lis pas tous - dans des colis bardés de timbres et de caractères bizarres et je l'entends parler à la radio avec Alain Veinstein ou Colette Fellous, bref ce n'est peut-être pas mon frelot de Tokyo ni mon Jap' chap mais c'est quelqu'un avec qui j'ai un lien privilégié, amical. Les livres de Michaël Ferrier sont en majorité des essais : sur Céline, sur Pinguet, sur le Japon, mais Sympathie pour le fantôme est un roman. Un roman dans lequel Michaël Ferrier se met en page, se met en je. On lui demande de participer à la conception d'une émission de télévision japonaise, une émission sur l'image de la France. L'auteur accepte, se met au boulot et livre trois textes qui forment les trois piliers de ce roman, trois portraits pour présenter son pays d'origine sous un jour différent, ceux d'Ambroise Vollard le marchand de tableaux, de Jeanne Duval la muse de Baudelaire, d'Edmond Albius le découvreur de la fécondation artificielle de la vanille. Trois Français du large, deux Réunionnais et une ? Haïtienne ? Mauricienne ? Dominicaine ? Malgache ? on ne l'a de toute façon jamais su. Trois personnages décalés : un hypersomniaque, un esclave et une ? actrice ? courtisane ? intrigante ? on ne le saura de toute façon jamais. Et pourtant, trois personnages essentiels de la France, de son histoire et de son rayonnement : sans Ambroise, pas de Cézanne, sans Jeanne, pas de Baudelaire, sans Edmond, pas de vanille. A l'heure où les fenêtres se ferment et où les portes claquent, Michaël Ferrier montre combien un pays s'enrichit par ce qui est autre, décalé, extérieur. Pas en publiant un manifeste sur la "littérature monde" mais en racontant une histoire : sur les trois portraits se greffe en effet le parcours de l'auteur dans ses occupations professionnelles et personnelles : vues de Tokyo, visite du pavillon Picasso d'Hakone, scènes de rue, scènes d'intérieur, scènes de la vie universitaire avec la description d'un colloque international sur l'identité de la France qui donne lieu à quelques portraits incisifs. "Et si le monde était sauvé par de petits textes privés et rares, à l'écart ?... des perspectives partielles, personnelles et singulières ?..." Michaël Ferrier n'est pas là pour sauver le monde, ça se saurait. Mais ses "petits textes privés", peuplés de fantômes plus ou moins cachés qui nous observent avec un regard familier - Baudelaire donc, Chateaubriand, Céline, Perec, Queneau... - et son appel à l'ouverture des fenêtres sonnent juste en cette période où l'air de chez nous apparaît légèrement vicié.

SAMEDI.
Football. SA Epinal - US Raon-l'Etape 2 - 0.

IPAD. 14 décembre 2008. 115 km. (9165 km).

Cherménil figure sur le calendrier des Postes, mais ne constitue qu’un écart de la commune de Cornimont, sur la route de La Bresse. On n’y trouve pas de monument aux morts, je m’y attendais, ni même de panneau d’entrée et je suis tout heureux de trouver cette unique plaque de rue pour attester de mon passage en ce lieu.

L'Invent'Hair perd ses poils.


Mandelieu-La Napoule (Alpes-Maritimes), photo de l'auteur, 10 avril 2007

Traduction possible : Manche à Hair.

Invent'Hair, bilan d'étape. Le bilan précédent datait du 25 avril dernier et portait sur 400 salons : il n’aura donc fallu que quatre mois pour atteindre la centaine suivante. 126 jours, 100 salons, la progression est très rapide en cette période estivale propice aux déplacements et donc aux trouvailles capillaires.

Bilan géographique. Le bilan des 400 laissait apparaître des trous béants dans le maillage territorial français, 30 départements n’étant pas encore représentés. La situation s’est sensiblement améliorée : les Hautes-Alpes, les Ardennes, la Charente, la Dordogne, la Haute-Garonne, l’Orne, les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées font désormais partie du PCF (Paysage Capillaire Français). Mieux, L’Invent’Hair a gagné l’outre-mer et compte aujourd’hui trois salons réunionnais. Rappel des départements métropolitains déshérités : Ain, Aisne, Ariège, Cantal, Cher, Corse-du-Sud, Eure, Gers, Indre, Landes, Loiret, Lot-et-Garonne, Mayenne, Meuse, Nièvre, Pas-de-Calais Seine-et-Marne, Tarn-et-Garonne, Yonne, Territoire de Belfort, Hauts-de-Seine, Val-de-Marne. Si l’on passe à l’échelon régional, on remarque que les 22 régions métropolitaines sont présentes, avec le palmarès suivant : Rhône-Alpes (79), Île-de-France (59), Lorraine (57), Provence-Alpes-Côte d’Azur (41), Bretagne (38), Languedoc-Roussillon (29), Limousin (17), Bourgogne (16), Alsace (14), Franche-Comté (13), Auvergne, Pays de la Loire (11), Champagne-Ardenne, Midi-Pyrénées, Basse-Normandie, Poitou-Charentes (8), Aquitaine, Centre (6), Haute-Normandie (5), Corse, Picardie (2), Nord-Pas-de-Calais (1), palmarès auquel il convient d’ajouter la région monodépartementale de la Réunion (3). Ces résultats bruts sont à tempérer selon la population des régions et plus significatif sera le taux de DCR (Densité Capillaire Régionale) qui nous montre que la Lorraine est la région la mieux pourvue avec un salon pour 38 998 habitants devant le Limousin (un pour 43 353), Rhône-Alpes (un pour 76 784), la Bretagne (un pour 82 112), le Languedoc-Roussillon (un pour 88 305) et la Franche-Comté (un pour 89 128). Un mot sur un cas terriblement inquiétant, celui du Nord-Pas-de-Calais qui apparaît comme un désert capillaire avec un seul salon à partager entre 4 021 676 habitants, ce qui fait long pour prendre rendez-vous. Pour ce qui est des communes, derrière Paris qui caracole logiquement en tête avec 54 salons (49 + 5), Lyon mène la meute des poursuivants (27 + 1) devant Epinal (9 + 2), Nancy (9 + 1) et Glasgow, auteur d’une progression spectaculaire (2 + 6) qui lui permet de dépasser Villeurbanne (7 + 0) et Marseille (6 + 0). Dans le haut du classement on notera également la bonne tenue d’Avignon (5 + 1) et de Mandelieu-La Napoule (4 + 2) qui lâchent Colmar (5 + 0), rattrapé par Concarneau au prix d’un très bel effort (2 + 3). Perpignan progresse aussi (1 + 2), mais à un rang plus modeste. Parmi les nouveaux venus, Obernai (0 + 3) se distingue devant Saint-Herblain, Saint-Pierre, Sutton et Thaon-les-Vosges (0 + 2). A l’étranger, le Portugal fait son apparition, l’Angleterre et l’Ecosse progressent fortement : 12 salons de plus, qui permettent au Royaume-Uni de passer à la première place des nations (17) devant le Maroc (8 + 0). Terminons cette rubrique par une invitation au voyage : "A Cuba, Raul Castro privatise les salons de coiffure" (Le Figaro, 15 avril 2010).

Bilan poétique. On ne reviendra pas ici sur les axes lexicaux décrits à l’occasion du bilan précédent et qui continuent à se tailler la part du lion, animal connu pour sa crinière : l’axe Hair (38,4 %), l’axe Tif (26,6 %) et l’axe Coif (12 %). Comme promis lors de la livraison précédente, ce sont les axes thématiques qui vont désormais nous intéresser avec, pour commencer, l’axe grammatical. On a pu remarquer, au fil des raisons sociales présentées chaque semaine dans les notules, la grande liberté prise à l’égard de l’orthographe la plus élémentaire. L’omniprésente apostrophe a sa part de responsabilité dans cet état de fait mais Adi’Tifs, Aktifs Coiffure, Coiffeure du nord, Es’Thête, Grafiti’f, Koiff’Hair, Les parfins pour les femmes ou Satif’Hair, montrent bien qu’elle n’est pas la seule. Cependant, la langue est une préoccupation chez les pommadins si l’on en croit les enseignes suivantes : Absolu’Tifs, Affirmatifs, la famille Epithète (8 variantes), Génitif, Gram’Hair, Impéra’Tif, la famille Infinitif (4 variantes, pas mal pour un mode dit invariable), Objec’Tif, sans oublier la famille Actif que l’on peut considérer comme un terme de conjugaison. Les sciences sont moins représentées, l’axe mathématique ne rassemblant que Hémisp’Hair, Mil’Coup’, Millen’Hair, Pi’Hair, Posi’tif, deux Racine carrée et un Triangul’Hair auxquels on peut ajouter, si l’on veut, La Tête au Carré.

Bilan humain. S’il en est le concepteur, l’organisateur et l’exégète, le notulographe doit avouer, à sa courte honte, qu’il n’est pas le pourvoyeur principal de l’Invent’Hair. Avec ses 90 clichés, il doit en effet s’incliner devant l’omniprésent Marc-Gabriel Malfant qui a photographié à lui seul 99 salons. Derrière ce tandem, on trouve l’étonnant Benoît Howson, notulien depuis juin 2009 seulement et qui, en un peu plus d’un an, a déjà fourni 29 photos émanant pour la plupart du monde anglo-saxon. Viennent ensuite Pierre Cohen-Hadria (28), Bernard Gautheron (24), Francis Henné (17), Hervé Bertin (15), Bernard Visse (11), Danielle Constantin, Christine Gérard et Philippe de Jonckheere (8). Les 163 salons qui restent se partagent entre 70 photographes environ. Que les choses soient claires : l’Invent’Hair n’est pas une compétition, on n’y décerne ni bigoudi d’or ni séchoir d’airain. Cependant, si la publication de ce classement pouvait réveiller quelques appareils photographiques endormis, l’émulation qui en naîtrait ne pourrait qu’être bénéfique à la cause capillo-calembourdesque qui semble chère à une grande partie de la notulie. Le record, signalé en tête de ce bilan, de 100 salons en 126 jours est à battre.

Bon dimanche.