Notules
dominicales de culture domestique n°441 - 4 avril 2010
DIMANCHE.
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LUNDI.
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MARDI.
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En feuilletant Livres Hebdo. Recommandations
professionnelles concernant les dalles à prédalles suspendues
avec boîtes d'attente, Société d'édition
du bâtiment et des travaux publics, 13 p., 7,50 €.
MERCREDI.
Courriel. Deux demandes d'abonnement
aux notules. L'une d'elles émane d'un exilé qui verrait
d'un bon oeil la publication du monument aux morts de son village d'origine
- Crans, dans l'Ain - dans l'IPAD. Bien sûr, l'IPAD n'est que départemental
et se limite aux Vosges mais qui sait si, une fois ce chantier achevé,
je n'entreprendrai pas un Itinéraire Patriotique Alphabétique
National. Dans ce cas, le département de l'Ain figurerait naturellement
en tête de l'IPAN, ce qui me permettrait de donner satisfaction
à ce néo-notulien dans quelques décennies.
Football. SA Epinal - CSO Amnéville
1 - 3.
JEUDI.
Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). C'est
une maison bleue de Dominique Dyens chez Denoël.
Lecture. Gustave Flaubert, une
manière spéciale de vivre (Pierre-Marc de Biasi, Grasset,
2009; 496 p., 21,50 €).
Trente ans, cela fait trente ans ou plus que Pierre-Marc de Biasi commente,
annote et édite Flaubert. Voilà qu'il se décide enfin
à livrer un Flaubert intégral, une étude complète
- si l'on met de côté son petit volume pour la collection
Découvertes de Gallimard. L'événement n'est pas négligeable,
mais contient sa part de risque : que peut nous apprendre le spécialiste,
fût-il le plus reconnu, après des décennies de gloses
? De Biasi renonce rapidement à la biographie classique : "Entouré
des inquiétudes maternelles, un cinquième enfant, que l'on
prénomme Gustave, naît le 12 décembre 1821, à
quatre heures du matin, etc." Une autre piste se présente,
celle de la biographie critique qui consiste à évaluer les
travaux des prédécesseurs. C'est vite réglé
("la thèse sartrienne d'une haine viscérale entre Gustave
et son père ne tient pas debout"), les légendes sur
"Madame Bovary c'est moi" et "Je l'appellerai Emma Bovary"
sont tôt rangées dans l'armoire aux fanfreluches, d'ailleurs
le volume ne s'encombre d'aucune bibliographie. Il faut inventer une troisième
voie et de Biasi sait laquelle choisir : "la critique génétique
est une des tendances les plus fécondes de la critique contemporaine".
Ça tombe bien, de Biasi est généticien et probablement
le seul à s'y retrouver dans les quelque 15 000 pages d'oeuvres
de jeunesse, carnets, dossiers documentaires, scénarios, correspondances,
notes de voyages et brouillons restés inédits du vivant
de Flaubert. Là où tant de biographes s'appuyaient uniquement
sur la correspondance de l'écrivain, de Biasi élargit le
spectre et le champ d'études, apportant, c'était son but,
un éclairage nouveau. Les oeuvres sont étudiées une
à une, dans l'ordre chronologique et pour chacune quelque chose
de nouveau apparaît, parfois un détail (que recouvre et que
devient le "nous", premier mot de Madame Bovary, que
signifient les deux occurrences du mot "baquet" dans L'Education
sentimentale), parfois une chose plus générale (quelles
sont les véritables raisons de l'échec de L'Education).
Au passage, l'auteur note l'importance des chevaux dans tous les écrits
de Flaubert, réhabilite Maxime Du Camp, rend hommage à Pierre
Dumayet (à juste titre, c'est le meilleur lecteur de Flaubert,
celui qui en parle le mieux en tout cas), souligne le rôle des Choses
de Perec et du Nouveau Roman dans la redécouverte de L'Education
sentimentale, étudie précisément les innovations
stylistiques apportées par l'homme de Croisset, dévoile
les autobiographèmes cryptés dans ses romans, déniche
une erreur de date dans la première édition Pléiade
de L'Education et, là où tous ses prédécesseurs
insistaient sur la masse des lectures entreprises par Flaubert pour sa
documentation, se penche sur son travail de relecture de ses propres oeuvres
pour ses corrections (volume estimé : 1 080 000 pages). Brillant,
sûr de lui, de Biasi séduit et intéresse, même
si un vocabulaire un peu trop technique vient obscurcir certains passages.
Il répond par anticipation au notulographe qui, il n'y a pas quinze
jours, proclamait du haut de son outrecuidance que L'Education sentimentale
était un roman "mal fichu". Il manque sans doute à
ce jeune coq plusieurs relectures pour savoir de quoi il parle. A ce propos,
faisons appel à un connaisseur : "Est à relire - Balzac
- Kafka (à finir) - La Bible - La Guerre et la Paix (7e
fois) - Stendhal - Le Rouge (12 f.) - La Chartreuse (6e)
- Leuwen (10e) - Ulysse (nième fois) - La Tentation
de Saint Antoine (4e fois) - L'Education sentimentale (5e fois)",
lettre de Georges Perec à Jacques Lederer, 5 septembre 1958. Rien
qu'en parcourant à nouveau le roman en diagonale cette semaine,
j'ai retrouvé une allusion aux coiffeurs ("Mieux vaut l'exubérance
que le goût, le désert qu'un trottoir, et un sauvage qu'un
coiffeur !" - et une pierre de plus dans le jardin de mon étude
à venir sur la place des coiffeurs dans la littérature française)
et une phrase lancée par Hussonnet à Frédéric
Moreau lors du sac des Tuileries en février 1848 ("Les héros
ne sentent pas bon"), plagiat par anticipation de celle qu'on attribue
tantôt à Gide, tantôt à Fargue, tantôt
à Cami mais qui semble bien être de Franc-Nohain : "Les
capitaines vainqueurs ont une odeur forte".
VENDREDI.
Courriel. Une demande d'abonnement
aux notules. Je sais, tout cela devient un peu répétitif
mais l'exposition avantageuse dont a bénéficié cette
semaine l'histoire
d'Armelle, proposée dimanche dernier, a occasionné
une affluence dont on ne saurait se plaindre ici. Il eût été
judicieux de récompenser les nouveaux-venus par un numéro
brillant et attractif mais ce ne sera sans doute pas le cas. Il est des
semaines ternes et il vaut mieux n'en rien dire que se forcer à
des figures imposées qui ne feraient que renforcer leur manque
d'éclat. Il fut un temps, c'est vrai, où j'étais
plus bavard. J'hésite désormais davantage à encombrer
les tuyaux avec des réflexions ou des relations d'événements
qui me semblent sonner creux. Je vois cela comme un progrès. Par
ailleurs, pour ne prendre qu'un exemple, il est certain que l'accroissement
de la population notulienne sur mon lieu de travail ne me permet plus
de parler de ma vie professionnelle aussi librement qu'autrefois. Ce n'est
peut-être pas un mal non plus. Voir ainsi les notules s'acheminer
vers un silence ponctué de quelques sonneries aux morts sous les
clignotements d'enseignes de coiffeurs ne me déplairait pas forcément.
SAMEDI.
Presse. Mise en ligne de ma chronique
sur Pierre Bost parue dans Vosges Matin le 25 mars dernier : http://pdidion.free.fr/chroniques/chroniques_2010.htm#250310
IPAD. 1er mai 2008. 113 km (7781 km).
868
habitants
Le monument
est au centre d’un grand square gazonné aux allées couvertes
de gravillons. Surprise de trouver une stèle en granit au pays
du grès rose.

Face :
1914
– 1918
A
nos morts
La
commune de Celles-sur-Plaine reconnaissante
1939-1945
Droite :
17
noms de AMBROISE Camille à CUNY Paul
17
noms de CUNY Georges Sergt à FRANQUIN Joseph
Dos :
Victimes
civiles
11
noms d’ANTOINE Charles à RHOTE Joseph
A.F.N.
HEITZMANN
Roland
Gauche :
17
noms de GAILLARD Victor à MATHIEU Pierre
14
noms de MEGRAT Louis Sergt à TREF Charles
Morts
en Indochine
DUVIC
Roger
MATHIS
Jacques
Sur le bas
de la stèle, trente-cinq noms sont inscrits sur les quatre côtés,
de BARRET Claude à THOMAS Pierre.
A l’écart
du monument, près de l’église, une imitation de la grotte
de Lourdes porte cette plaque. Le texte est un rien en contradiction avec
le monument où figurent les noms des victimes civiles de 39-45.

L'Invent'Hair
perd ses poils.

Lyon (Rhône), photo de Patrick Flandrin, 16 décembre 2006
Bon dimanche.
Notules
dominicales de culture domestique n°442 - 11 avril 2010
DIMANCHE.
Itinéraire patriotique départemental.
Le monument de Dombasle-en-Xaintois est enregistré.
LUNDI.
Itinéraire patriotique départemental.
Le monument de Dombrot-le-Sec est enregistré.
MARDI.
En feuilletant Livres Hebdo. Pourquoi
les mouches aiment-elles les crottes ? EDP sciences, 200 p., 15 €.
Par ailleurs, en jetant un oeil sur le dossier consacré aux libraires
dans ce numéro du 26 mars dernier, on s'aperçoit que certains
d'entre eux font preuve d'une imagination tout à fait digne des
pommadins de l'Invent'Hair : Les Mots Passants à
Aubervilliers, Le Genre urbain à Paris, M'Lire à
Laval...
JEUDI.
Lecture. Les Lieux sombres (Dark
Places, Gillian Flynn, 2009, Sonatine, 2010 pour la traduction française,
traduit de l'américain par Héloïse Esquié; 492
p., 22 €).
"La mesquinerie qui m'habite est aussi réelle qu'un organe.
Si on me fendait le ventre, elle pourrait fort bien se glisser dehors,
charnue et sombre, tomber par terre, et on pourrait sauter dessus à
pieds joints. C'est le sang des Day." C'est Libby Day qui parle en
ouverture de ce livre. Le sang des Day a été versé
en 1985 : un massacre familial dans une ferme du Kansas dont Libby, alors
âgée de sept ans, fut la seule rescapée. Son témoignage
a envoyé en prison son frère Ben, quinze ans, reconnu coupable
du meurtre de sa mère et de ses soeurs. Pendant vingt-cinq ans,
Libby a vécu grâce à des dons, des témoignages,
des livres sur le drame. Mais la source est tarie, l'histoire de "Baby
Day" ne fait plus recette et elle accepte la proposition d'une association,
le Kill Club (!), de partir à la recherche d'éventuels témoins
du drame. En parallèle à cette enquête, le lecteur
suit le déroulement de la journée qui a abouti au meurtre,
vue d'un côté par sa mère et de l'autre par Ben. Trois
récits, un en direct, deux en différé, un chapitre
pour chacun en stricte alternance, la machine tourne rond. Au fil des
pages, on découvre le quotidien d'une famille d'agriculteurs ruinés
vivant d'expédients, un monde sordide totalement à la marge
de la société. Petit à petit, une vérité
plus complexe que celle à laquelle avait abouti l'enquête
de l'époque apparaît, jusqu'à la révélation
du véritable coupable. C'est un roman noir parfaitement mené,
maîtrisé de bout en bout, sans déchet, dans lequel
on ne trouvera aucun personnage positif. Une seule fausse note, la litanie
finale des remerciements de l'auteur. On a beau y être habitué
avec les écrivains américains, celle de Gillian Flynn est
un sommet du genre avec son "adorable groupe d'amis et de parents
qui [lui] prodiguent constamment des encouragements", son "supergroupe
d'amis écrivains" et son mari, "un homme génial,
drôle, supersexy, et doté d'un coeur gigantesque". A
ce moment, j'ai vraiment cru que c'était Caroline qui avait écrit
le bouquin.
SAMEDI.
IPAD. 1er juin 2008. 151 km (7932
km).

265 habitants
Le
monument est à l'écart de la mairie, sur une placette négligée
: il y a des boutons d'or dans la pelouse, de l'herbe entre les dalles,
de la mousse sur la stèle.

Certilleux
à ses enfants
MIRE Léon
MIRE Alcide
BOGARD Albert
LAVAL Maurice
MULOT Louis
CHAMPAGNE Auguste
TRAVERS Georges
KULNER Henri
Le
monument semble être signé en bas à gauche V. (?)
GERARD à NEUFCHÂTEAU. Dans le cimetière, une autre
stèle est visible, érigée par le Souvenir français
en mémoire de trois des victimes.

L'Invent'Hair
perd ses poils.

Paris, rue du Théâtre, photo de Danielle Constantin, 10 décembre
2006
Bon
dimanche.
Notules
dominicales de culture domestique n°443 - 25 avril 2010
DIMANCHE.
Courriel. Deux demandes d'abonnement
aux notules.
Lecture. Ubu roi (Alfred Jarry,
Mercure de France, 1896, rééd. in Oeuvres complètes
I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 236, 1972;
textes établis, présentés et annotés par Michel
Arrivé; 1328 p., s.p.m.).
Le problème avec Jarry est de parvenir à lire au-delà
de la légende, de trouver des pistes dans ce que Michel Arrivé
appelle un "champ de ruines sémantico-stylistique". Cette
édition en livre quelques-unes qui permettent de dépasser
le plan potachique de la pièce - bien réjouissant au demeurant
: les implications héraldiques, l'analyse linguistique, la symbolique
scatologique et sexuelle sont ici soulignées et creusées
d'une façon qui fait de Jarry un auteur bien supérieur à
un simple farceur.
LUNDI.
Lecture. Le Correspondancier du Collège de 'Pataphysique.
Viridis Candela, 8e série, n° 8 (15 juin 2009, 128 p.,
15 €).
Numéro hommage du Collège à l'un de ses membres,
et pas des moindres, puisqu'il s'agit de Boris Vian, Transcendant Satrape
en son temps. Avec une pièce radiophonique inédite, une
étude sur la botanique dans les romans vianesques et surtout un
portrait très fouillé du Major dû à Alain Zalmanski.
Le Major est un personnage qui apparaît à plusieurs reprises
chez Boris Vian, parfois sous des appellations fantaisistes, parfois sous
son véritable nom. Car le Major, Jacques Loustalot pour l'état-civil,
a bien existé. Né en 1924, il rencontre Vian à Capbreton
en 1940 et suscite de suite son intérêt en se présentant
comme "le bienheureux Major retour des Indes". Son oeil de verre,
sa beauté, sa culture, son goût pour l'alcool et les histoires
à dormir debout en font un personnage hors du commun. A Paris,
après la guerre, Vian et le Major deviennent inséparables.
"C'est le bienheureux Major retour des Indes, personnage loufoque
que Vian apprécie et envie : le Major est pris quelquefois par
l'envie de se promener sur les corniches des toits, de "foutre en
l'air une soirée" parce qu'elle ne lui plaît pas et
a l'habitude de sortir de chez les gens par la fenêtre, en descendant
à l'aide d'une corde confectionnée avec les draps de la
maison ou un cordon téléphonique." Les frasques du
Major avec Vian, Jean Suyeux, Jean Carmet et André Frédérique
- certaines furent filmées - sont trop nombreuses pour être
rapportées ici. Pourtant, le passage terrestre du Major fut de
courte durée puisqu'il prit fin en 1948 : "Au cours d'une
surprise-partie très avinée, au dernier étage du
n° 2 de la place du Docteur-Alfred-Fournier, dans le Xe arrondissement,
le Major se tua en tombant d'une fenêtre dans des circonstances
mystérieuses." On dit fréquemment que le Major représentait
ce que Boris Vian aurait voulu être.
MARDI.
Lecture. Guide des collections
XVIe - XVIIe siècles (Musée des Beaux-Arts de Rouen,
Réunion des Musées Nationaux; 232 p., 100 F).
Une belle collection avec ce qu'il faut de grands noms et de découvertes
à faire (une saisissante Jeune femme sur son lit de mort anonyme)
malheureusement mal mise en valeur par la taille des reproductions. Les
notices explicatives renvoient parfois à des détails absolument
invisibles, ce qui est un rien fâcheux.

Ecole flamande, 1621, Jeune femme sur son lit de mort
JEUDI.
Exode. "Un nuage de cendres et
de fumées sur le point d'envahir le nord de la France" (les
radios). Un quelconque Saknussemm aura sans doute chatouillé d'un
peu trop près les entrailles d'un Sneffels islandais. Dans ce cas-là,
on ne fait ni une ni deux : tout le monde en voiture et direction plein
sud. On s'arrête au milieu de la nuit à Mandelieu - La Napoule,
sous un ciel clair.
VENDREDI.
Lecture. L'Echo des morts (Nattfak,
Johan Theorin; Wahlström & Widstrand, Stockholm, 2008, Albin
Michel, 2010 pour la traduction française; traduit du suédois
par Rémi Cassaigne; 416 p., 20 €).
Il s'agissait pour Johan Theorin de transformer l'essai réussi
avec L'Heure trouble, un premier roman remarquable et remarqué.
Pour ce faire, il a choisi de conserver le cadre, les paysages désolés
de l'île d'Öland, un des personnages en la personne du vieux
Gerlof, détenteur des secrets locaux, ainsi qu'un schéma
qui permet de trouver dans le passé les explications d'un drame
actuel, en l'occurrence la noyade d'une femme récemment installée
dans l'île. Comme ingrédient supplémentaire, il a
incorporé une dose de surnaturel, faisant apparaître des
fantômes et des croyances qui donnent une touche irrationnelle à
son histoire. Pas évident mais Johan Theorin réussit à
éviter le piège du ridicule avec habileté, tout comme
il avait intelligemment évité de tomber dans le pathos avec
son roman précédent, construit autour d'un enlèvement
d'enfant. Malgré cela, L'Echo des morts reste un cran en
dessous de L'Heure trouble, principalement à cause des scènes
d'action qui viennent pimenter les derniers chapitres, un exercice inutile
pour un romancier qui excelle avant tout dans la mise en place d'une atmosphère.
SAMEDI.
Lecture. Irénée
(Antoine Broto, La Table Ronde, 2009; 192 p., 18 €; sélectionné
pour le Prix René-Fallet 2010).
Vie vacancière. Les vacances,
c'est l'occasion de changer de rythme, de ne plus être esclave du
temps et des habitudes induites par l'emploi réglé de celui-ci.
Moi, à partir du moment où je peux me lever avant sept heures,
déjeuner avant huit, manger à midi, siester à deux
heures, goûter à cinq, dîner à huit, lire mon
livre et voir mon film quotidiens, je n'ai absolument rien contre.
IPAD. 6 juillet 2008. 68 km (8000
km).

471
habitants
Une
stèle simple, sur le côté de l'église. Le parterre
est fleuri avec soin. Sur la gauche, une plaque presque illisible («
A nos chers disparus 1939-1945 »), sur la droite, un crucifix à
l'horizontale, tel qu’on en voit sur les tombes des cimetières.

Face
:
A
la mémoire glorieuse
des
enfants de Chamagne
Morts
pour la France
1914-1918
Gauche :
LAURENT
Paul Charles René Soldat 1915
PAULY
Justin Emile " 1916
TROMPETTE
Edouard Joseph Ambroise " "
VILLEMIN Louis Caporal "
VINOT
Joseph Camille Soldat "
GOMBAUT
Charles Louis " "
MANGIN
Henri " 1917
LOUIS
Jules Clément " "
*JEANDRON
Marc Edmond " "
*JEANDRON
André Félix " 1918
GENAY
Marie Charles " "
*JAQUEL
Auguste Sergent "
1939
– 1945
BROCHIN
Roger Albert
DIDIER
Robert Eugène
ETIENNE
Lucien Louis
PERRIN
Jean Fernand
PETITGAND
Pierre François
NOEL
Albert Georges
Droite :
JAQUEL
Jean Louis Caporal 1914
BATAL
Nestor Eugène Soldat "
LAURENT
Marie Joseph Paul " "
FADE
Marie Isidore " "
PROT Eugène " "
MARCHAL
Jean Georges Marie Xavier Caporal "
MARTIN
Jean Victor Soldat 1915
REMY
Marcel " "
*PHILIPPE
Marie Hubert Sergent "
REMY
Raymond Soldat "
DORGET
Félix Hubert " "
PAULY Henri " "
CLEMENT
Roger Auguste Caporal "
* : signifie
que le nom est suivi d’un ou deux symboles représentant des décorations.
" :
ce signe « idem » apparaît sous la forme suivante sur
le monument : d°
L'Invent'Hair perd ses poils.

La Mulatière (Rhône), photo de Marc-Gabriel Malfant, 23 décembre
2006
Les
points de suspension permettent de distinguer cet Hair du temps de ceux
de Maxéville (361) et de Compiègne (385).
DIMANCHE.
Lecture. L'Imposteur (François
Marchand, Le Cherche Midi, 2009; 144 p., 13 €; sélectionné
pour le Prix René-Fallet 2010).
LUNDI.
Lecture. Un sentiment (Natascha Cucheval, Fayard, 2009;
176 p., 17,90 ; sélectionné pour le Prix René-Fallet
2010).
MARDI.
Lecture. Irène sur le plancher
des vaches (Frédéric Michaud, éditions Delphine
Montalant; 112 p., 15 €; sélectionné pour le Prix René-Fallet
2010).
Maintenant que la première partie de mon travail en tant que juré
du Prix René-Fallet est terminée, on peut penser à
secouer l'oblomovisme ambiant et jouer les touristes. Au programme, une
petite virée à l'étranger ou presque. Il paraît
qu'il y a cent cinquante mille touristes bloqués à l'étranger
par la fermeture des aéroports, montrons-nous donc un peu solidaires.
Monaco est à moins d'une heure de route, en voiture pour Monaco.
Nous nous posons aux environs du casino et commençons à
écarquiller nos yeux de ploucs devant les prix affichés
dans les vitrines, les livrées des portiers, les tribunes installées
en vue du Grand Prix et les automobiles à capot blasonné
quand l'hypoglycémie de Lucie commande la quête de quelque
chose à croûter. Pas facile de trouver un semblant de nourriture
prolétarienne au milieu des enseignes Fauchon, Hédiard et
Ladurée mais nous réussissons à nous attabler devant
une poignée de sandwiches dans une galerie commerciale, c'est merveilleux,
on se croirait au Centre Saint-Sébastien de Nancy. Nous pouvons
dès lors attaquer le Rocher, la place du Palais avec ses empilements
de boulets de canon liés entre eux par des toiles d'araignée,
la cathédrale, le Musée océanographique, les jardins
Saint-Martin d'où je suis heureux de deviner le stade Louis II,
et les ruelles, mélange harmonieux de Riquewihr et de Mont-Saint-Michel.
Ca suffira, nous avons des munitions pour le retour. Parce qu'il faut
penser au retour, pas à Mandelieu, mais plus tard, à Epinal,
où il s'agira de faire face. Parce que les cent cinquante mille
touristes bloqués à l'étranger - qui ne sont plus
que quatre-vingt-cinq mille cet après-midi sur France Info mais
qui occupent toujours la moitié des informations -, ceux-là
vont bien finir par rentrer, à pied, à cheval ou en voiture.
Et la semaine prochaine, à l'école, à la pharmacie,
au bistrot, dans le train, ils vont se sentir obligés de raconter
leurs aventures, pensant, à tort ou à raison, que l'on n'en
a rien su. Nous sommes en passe de vivre des temps redoutables.
JEUDI.
Tourisme. Comme il n'y aura pas de
monument aux morts à la fin de ce numéro, il faut trouver
un produit patriotique de remplacement. Nous profitons des richesses de
la région et allons rendre hommage à l'adjudant Gerber et
à ses hommes devant l'ancienne gendarmerie de Saint-Tropez où
nous nous tirons mutuellement le portrait. A chacun ses totems, à
chacun ses lieux de mémoire.
VENDREDI.
Collections de printemps. La dernière
escapade des vacances sera pour Cannes, dont je n'ai pas encore épuisé
les richesses capillaires. De plus, je tiens à photographier une
plaque de rue repérée l'an passé. Il s'agit de la
rue Léon Noël. Je ne sais de quel Léon Noël il
s'agit, il y en eut plusieurs qui furent relativement célèbres,
un ambassadeur, un résistant, un scénariste, un lithographe,
nous dit Wikipédia. Je collectionne les images de Léon Noël.
Celle-ci sera la deuxième pièce de ma collection, après
la photo de la tombe d'un Léon Noël comédien enterré
au Père-Lachaise. Je sais, ça ne fait pas très riche
comme collection mais j'en ai fini avec les collections imposantes. Comme
beaucoup, j'ai commencé par rechercher de vastes collections, les
timbres, les briquets à essence, les verres à bière,
des choses comme ça. Maintenant, le temps et l'espace se réduisant
peu à peu, je suis devenu adepte des collections minimalistes.
Outre ma collection de Léon Noël, riche désormais de
deux éléments, je collectionne par exemple les différents
titres de Wuthering Heights en édition française
(un élément) et les tickets de caisse historiques (deux
éléments, une note de 14,92 € et une autre de
19,29 €). Il me reste à saisir au vol une camionnette Léon
Noël qui me dépasse parfois sur le chemin du boulot, à
acheter quelque part pour 17,89 € ou 15,15 € de denrées
diverses et j'arrêterai là ma carrière de collectionneur.
SAMEDI.
Invent'Hair, bilan d'étape. L'Invent'Hair,
qui est un objet d'étude et non une collection, est à ce
jour riche de 424 clichés. 107 ont été publiés
dans les notules depuis le 8 mars 2004, date à laquelle le salon
Mouss'Tifs de Nomexy (Vosges) eut le redoutable honneur d'inaugurer la
série. Le chantier est aujourd'hui suffisamment étendu et
avancé pour quitter son caractère uniquement compilatoire
et supporter une étude statistique. Celle-ci portera sur les 400
premières photos et sera actualisée à chaque nouvelle
centaine atteinte. Elle portera sur deux éléments, l'élément
géographique et l'élément poétique.
Bilan géographique. Chantier international, l'Invent'Hair est cependant
marqué par un gallocentrisme tout à fait naturel si l'on
prend en compte son foyer de conception et d'étude, ainsi que le
goût des coiffeurs français, plus prononcé que partout
ailleurs semble-t-il, pour les calembours vaseux. 365 salons sur 400 sont
français, soit 91,5 %. Les autres pays représentés
sont, dans l'ordre, le Maroc (8), les Etats-Unis (5), le Royaume-Uni (4
salons écossais, 1 anglais), l'Espagne (4), la Belgique, la Turquie
(2), le Togo, les Pays-Bas, la Suisse, l'Allemagne, le Pérou, l'Irlande
et le Canada (1). Les départements français illustrés
sont Paris (49 photos), le Rhône (47), les Vosges (33), la Meurthe-et-Moselle
(17), Vaucluse (11), l'Aude, la Loire (10), les Bouches-du-Rhône
(9), l'Ardèche, le Finistère (8), l'Allier, la Creuse, l'Ille-et-Vilaine,
les Pyrénées-Orientales, la Saône-et-Loire (7), la
Loire-Atlantique, la Manche, le Morbihan (6), les Alpes-Maritimes, le
Doubs, la Drôme, le Bas-Rhin, le Haut-Rhin, la Seine-Maritime (5),
les Côtes-du-Nord, l'Eure-et-Loir, l'Hérault, la Haute-Saône
(4), la Charente-Maritime, l'Isère, le Lot, la Lozère, la
Marne, le Puy-de-Dôme, le Var, la Haute-Vienne (3), les Alpes-de-Haute-Provence,
la Corrèze, la Corse, la Côte-d'Or, le Gard, le Jura, la
Haute-Marne, la Savoie, les Yvelines (2), l'Aube, l'Aveyron, le Calvados,
la Gironde, l'Indre-et-Loire, le Loir-et-Cher, la Haute-Loire, le Maine-et-Loire,
la Moselle, le Nord, l'Oise, la Sarthe, la Haute-Savoie, les Deux-Sèvres,
la Somme, le Tarn, la Vendée, la Vienne, l'Essonne, la Seine-Saint-Denis,
le Val-d'Oise (1). Au terme de ce palmarès, on s'aperçoit
que le territoire français est assez bien quadrillé (même
si l'on peut déplorer l'absence des DOM-TOM, heureusement réparée
dans la centaine en cours) puisque 66 départements sur 95 sont
représentés (69,47 %). Cependant, il reste des régions
à explorer et il serait bon, à l'heure des préparatifs
de vacances, que les notuliens envisagent d'un jour excursionner, sinon
villégiaturer, dans un des départements délaissés
afin d'y explorer les richesses capillaires. Sur simple demande, un ordre
de mission peut leur être fourni pour l'une des destinations suivantes
: l'Ain, l'Aisne, les Hautes-Alpes, les Ardennes, l'Ariège, le
Cantal, la Charente, le Cher, la Dordogne, l'Eure, la Haute-Garonne, le
Gers, l'Indre, les Landes, le Loiret, le Lot-et-Garonne, la Mayenne, la
Meuse, la Nièvre, l'Orne, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-Atlantiques,
les Hautes-Pyrénées, la Seine-et-Marne, le Tarn-et-Garonne,
l'Yonne, le Territoire de Belfort, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne.
A l'échelon inférieur, celui des communes (hors Paris),
Lyon arrive largement en tête (27 salons) devant Epinal et Nancy
(9), Villeurbanne (7), Asilah (Maroc, première ville étrangère)
et Marseille (6), Avignon et Colmar (5).
Bilan poétique. Les appellations consignées dans l'Invent'Hair
se déclinent selon trois axes lexicaux majeurs. L'axe Hair, à
lui seul, concerne 164 enseignes (41 %), devant l'axe Tif (113 enseignes,
28,25 %) et l'axe Coif (45 enseignes, 11,25 %). Le reste, la piétaille
des Mèche, Coupe, Tête, Frange et autres n'occupe donc que
78 enseignes, soit 19,5 %. Sept salons remarquables, Satif'Hair, Faudra
Tif Hair, l'Hair Créatif, Hair'Méneutif et trois Coiff'Hair
offrent la particularité de se conjuguer selon deux des trois axes
principaux. Au sein de ceux-ci, la famille Créatif (19 photos)
se taille la part du lion devant la famille Hair du Temps (15), la famille
Diminutif (12), la famille Imaginaire (8), les familles Actif et Planétaire
(7). Il convient de parler de familles et de nommer celles-ci de façon
orthodoxe car il existe de nombreuses variantes autour d'un même
intitulé selon l'usage qui est fait de l'orthographe, des espaces,
des apostrophes, des majuscules, des tirets et du nombre. Ainsi, pour
prendre l'exemple le plus significatif, la famille Diminutif comprend
un Diminu Tifs, un Diminue Tifs, un fort peu audacieux Diminutif, cinq
Diminu'Tif, un Diminu'tif, un Diminu-Tif, un Diminu'Tifs et un Diminu-Tifs.
L'apostrophe constitue un cas à part : toutes familles confondues,
elle apparaît 216 fois, donc dans 54 % des cas. Son emploi est totalement
anarchique : l'apostrophe sert à élider (La Boît'
à Tifs), à séparer un mot en deux parties pour mettre
en valeur un élément de l'appellation (le plus souvent un
des trois axes susmentionnés, comme dans Cap'Tif), et parfois à
rien du tout (Graffiti'f). L'apostrophe semble avant tout être là
pour donner un tour moderne, léger, en un mot anglo-saxon (rock'n'roll
!) à l'appellation la plus inoffensive. Il existe bien entendu
d'autres traits intéressants, sur le plan thématique notamment,
mais ne chargeons pas la barque pour ce premier bilan, d'autres étapes
suivront.
Bon dimanche.
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