Notules dominicales 2011
 
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Notules dominicales de culture domestique n°474 - 2 janvier 2011

LUNDI.
          Lecture. Bulletin des Amis d'André Gide n° 158, XLIe année - vol. XXXVI (Centre d'Etudes gidiennes, 150 p., 13 €).
                       Les Amis d'André Gide sont des gens comme on n'en fait plus guère. Appâté par un article de ce numéro concernant Yvonne Davet, je les ai contactés pour savoir à quelles conditions ils pouvaient me l'envoyer hors abonnement. "Aboulez votre adresse", m'ont-ils répondu, qu'on vous envoie la chose. "Mais l'argent ?", m'interloquai-je. "L'argent, vous l'enverrez quand vous aurez reçu le bouquin, le prix est marqué dessus." De telles moeurs commerciales se font rares de nos jours. Elles ne risquent pas de perdurer vu que, évidemment, je me suis bien gardé de leur envoyer leur pognon (rires gras). Mais non, voyons. J'ai même attendu que le chèque soit encaissé avant d'ouvrir le volume. Qui contient donc ce fameux article sur Yvonne Davet, une personne déjà présentée dans une notules précédente à l'aide d'un extrait d'Histoires littéraires : "Véritablement tragique est le "In Memoriam Yvonne Davet" d'Alain Goulet. La vie de cette femme montre comment Gide savait créer des catastrophes humaines. Mariée, mère d'un enfant, militante communiste, Yvonne Davet s'éprend de Gide, en reçoit un baiser qui la décide à tout quitter (elle ne reverra jamais son petit garçon d'un an) et commence une vie de poursuite du grand homme qui la repousse sans ménagement, tout en lui confiant de vagues tâches éditoriales qui, le plus souvent, n'aboutissent à rien. Être poursuivi par elle devait être bien pénible, mais Gide la conduisit à une pathétique autodestruction, dont son travail de traductrice sauva mal Yvonne Davet. A la mort de Gide, dont elle veille la dépouille, commence une autre poursuite : cette fois, c'est elle qui est poursuivie par les universitaires qui veulent la faire parler et obtenir des lettres reçues de Gide." Alain Goulet raconte sa propre quête, comment il fut reçu par Yvonne Davet, ce qu'elle lui confia en 1982 et 1983 et le refus net qu'elle opposa à sa demande de créer un fonds Yvonne Davet à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet à partir des documents qu'elle détenait. Un parcours passionnant autour d'un personnage énigmatique, une femme blessée à jamais (et morte en 2007) dont les yeux finirent toutefois par se dessiller, comme le montre cette lettre qu'elle écrivait à Marc Bernard (la date n'est pas précisée dans la chronique des ventes et catalogues de Jean-Paul Goujon, Histoires littéraires n° 39, juillet-août-septembre 2009) :
"J'ai été, d'autre part, à nouveau secouée moralement d'apprendre qu'en 47, A.G. a commis un autre abus de confiance, envers des parents qui l'hébergeaient, et cette fois avec un enfant tout jeune, un petit garçon de 7 ou 8 ans [...]. Les parents ont surpris G. au retour d'une sortie, l'enfant était rentré de classe avant eux. Le pauvre petit, terrifié, tremblait des pieds à la tête. Se voyant surpris, A.G. a fait semblant de se chauffer les mains ! Il maintenait le petit étendu; n'ayant pas le temps de retirer ses mains de la culotte du gosse en entendant entrer les parents, il a dit : "Mon petit M., laisse-moi me chauffer les mains !" Je trouve ça lamentable. [...] Sur le moment j'ai été indignée, à présent j'éprouve une sorte de pitié pour A.G. [...] Mais je resongeais à notre conversation, à cette espèce d'admiration que semble avoir Marc  pour cette... verdeur... en laquelle je ne puis plus voir qu'une pitoyable débauche sénile à laquelle il est devenu incapable de résister, quoi qu'il lui faille faire pour ça ! Il n'y a qu'une excuse : l'âge, et c'est triste. mais non, non, je ne peux plus admirer, et c'est peut-être là ce qui m'a été le plus douloureux, cette déception morale, venant de lui ! Désormais, je ne pourrais plus tolérer de lui ni de son entourage sans me mépriser moi-même, les humiliations qu'il avait pris l'habitude de me faire subir, persuadé qu'il lui suffirait de siffler pour que j'accoure, quoi qu'il m'ait dit ou fait... Tout est mieux ainsi, je veux dire : il était bon que cette rupture ait enfin lieu..."
 
                       L'homme inquiet (Den orolige mannen, Henning Mankell, Leopard Förlag, Stockholm, 2010 pour l'édition originale, Le Seuil, coll. Policiers, 2010 pour la traduction française, traduit du suédois par Anna Gibson; 560 p., 22 €).
                       C'est un enterrement de première classe qu'offre ici Henning Mankell au personnage de Kurt Wallander. Et vu l'état dans lequel il laisse son héros à la fin de ce qui doit être sa onzième aventure, on imagine mal qu'il puisse lui faire effectuer un come back dans le genre que celui que John Harvey vient de signer avec son inspecteur Resnick. Mankell termine donc la série avec un livre à deux faces : une enquête policière et une cérémonie des adieux. L'enquête est soignée, on en a l'habitude, assez complexe avec des implications historiques aussi fréquentes chez Mankell que chez Indridason, son confrère islandais. Ces auteurs aiment se plonger dans l'histoire de leur pays, notamment dans celle de la guerre froide avec ses ingrédients de roman d'espionnage. Mais aussi réussie soit-elle, cette aventure policière passe au second plan pour le lecteur qui connaît Wallander depuis ses débuts. C'est l'homme qui l'intéresse davantage, un homme désormais malade, désabusé, à qui la venue d'une petite-fille évite de tomber dans la désillusion la plus complète. Mankell rassemble autour de lui les comparses de ses aventures précédentes, évoque ses enquêtes passées, multiplie les séquences souvenirs pour faire de son livre un tombeau plus qu'un polar. C'est parfois un peu maladroit, les appels au pathos manquent de finesse mais ça fonctionne et le lecteur apprécie la lenteur qui lui permet de cheminer encore un peu en compagnie du héros. C'est encore mieux quand l'esprit de celui-ci se met à divaguer et à faire des coq-à-l'âne dignes des personnages de Vassilis Alexakis : "Il déjeuna à bord du ferry, à côté d'un routier bavard qui l'informa qu'il se rendait à Dresde avec quelques tonnes de nourriture pour chien. Pourquoi les chiens allemands devraient-ils manger suédois ? voulut savoir Wallander." Rarement, pour ne pas dire jamais, on aura un auteur mettre autant de soin à prendre congé d'un personnage. 
 
 
MARDI.
           En feuilletant Livres Hebdo. Trouvé dans la rubrique "Retenues de titres" : "Les éditions Fluide Glacial retiennent le titre suivant : Encyclopédie du prout, pour un album à paraître."
 
           Vie musicale. Quand j'ai pris ma retraite musicale, il y a une bonne douzaine d'années, je pensais sincèrement que c'était pour de bon. Je n'ai d'ailleurs jamais retouché la guitare, sauf dernièrement pour seconder Alice et m'apercevoir qu'elle m'avait déjà dépassé. Pourtant, il va falloir s'y remettre : des personnes de bonne volonté ont décidé de rendre un hommage musical à JiP, clavier du groupe dans lequel j'ai officié, disparu en novembre dernier. Et c'est comme ça qu'on se retrouve, nous les rescapés, les trompe-la-mort, pour une journée destinée à raviver quelques morceaux du bon vieux temps, histoire de faire bonne figure sur scène. Des retrouvailles de longue date, pour la plupart, mais les bonnes choses ne s'oublient pas tant que ça et on arrive assez rapidement à remettre la machine en marche et à recalibrer quelques anciens morceaux. On joue, on jase, on rigole, on fait semblant de ne pas s'apercevoir des brioches qui enflent et des crânes qui se dénudent. On verra ce que ça donne en public, en attendant j'ai mal aux doigts.
 
 
MERCREDI.
                  Vie parisienne (avortée). Je renonce au voyage que je devais entreprendre aujourd'hui au vu des situations climatique (médiocre) et familiale (tragique).
 
 
JEUDI.
          Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
 
SAMEDI.
             Bilan annuel 2010.
                                        * 98 livres lus (- 12 par rapport à 2009)
                                        * 259 films vus (+ 3)
                                        * 318 abonnés aux notulesversion électronique (sans oublier les irréductibles abonnés papier de l'Aveyron) (+ 33)
                                        * 43268 visites sur la page d'accueil du site des notules (+ 6667)
 
                                        En ce qui concerne les chantiers littéraires :
 
                                        * 4426 Souvenirs quotidiens notés (+ 365, le compte est bon)
                                        * 379 volumes étudiés dans L'Atlas de la Série Noire (+ 27)
                                        *168 communes visitées (+ 37) de Ableuvenettes (Les) à Estrennes dans le cadre de L'Itinéraire patriotique alphabétique départemental
                                        * 171 photos de Bars clos commentées (+ 22)                                      
                                        * 558 Bribes oniriques recueillies (+ 14)
                                        * 821 tableaux commentés dans la Mémoire louvrière (+ 90)
                                        * 287 publicités murales peintes photographiées (+ 28)
                                        * 388 numéros de téléphone récoltés dans des films en vue d'un travail à venir (+ 55)
                                        * 568 photographies de salons de coiffure pour l'Invent'Hair (+ 180)
                                        * 116 frontons d'école photographiés pour l'Aperçu d'épigraphie républicaine (+ 24)
                                        * 51 Lieux où j'ai dormi retrouvés ou ajoutés et photographiés (+ 11)                                                                                            
                                      
    Parutions :
 
                                       * Bulletin de l'Association Georges Perec n° 55 & 56
                                       * 6 articles dans la page "Livres" de Vosges Matin.
                                       * Notes de lecture et Chroniques de l'actualité littéraire dans la revue Histoires littéraires n° 40-41-42-43
                                       *Reproduction de notules dans les revues en ligne Le POD et Chos'e et dans le n° 12 de la revue papier Les Refusés
 
                                       Santé :
 
                                       * 6 nouvelles salles d'attente fréquentées et photographiées
                                       * Poids oscillant entre 70,2 et 72,2 kg
 
                                       L'homme de l'année, qui a attendu le tout dernier moment pour se manifester :
 
le cambrioleur
 
             IPAD. 21 mai 2009. 85 km. (10841 km).
 
 
   Pas de monument non plus au Costet Beillard.
 
             L'Invent'Hair perd ses poils.


Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), photo de Marc-Gabriel Malfant, 13 août 2007
 
 
Bon dimanche.

 

Notules dominicales de culture domestique n°475 - 7 janvier 2011

LUNDI.
          Vie ferroviaire. Pas de 7 heures 31 ce matin, on ne sait où il est passé, il n'est pas à quai, il n'est pas affiché. La gare a peut-être été cambriolée, comme une vulgaire pharmacie de quartier, qui sait, ça semble être de saison. Je traverse la rue, rentre at home, reviens pour le 8 heures qui finira par partir à 8 heures 10. On y trouve les orphelins du 7 heures 31 et les habitués du 8 heures, un peu fâchés de se voir piétiner les arpions, d'ordinaire ils ont plus de place. Comme je fréquente indifféremment les deux durs, je connais à peu près tout le monde : étudiants à gros sacs, lycéens à écouteurs, hommes bien mis, l'air de banquiers, le conseiller général du coin qui achète tous les journaux et n'en lit pas un, préférant passer son temps à discourir au profit d'une petite cour dans laquelle il ne m'attirera jamais, les deux dames qui sont les seules à descendre avec moi à Châtel-Nomexy et qui travaillent à l'Institut Médico-Educatif, un type toujours en sueur qui sent l'eau de toilette bon marché, une dame de petite taille qui lit, quand elle lit, des livres de la collection Harlequin. Je m'assois à côté d'elle et comme souvent quand les circonstances sont un peu inhabituelles, la conversation s'engage. Je crois même que c'est moi qui l'engage, ce qui se produit environ une fois tous les sept ou huit ans, je suis un peu perturbé en ce moment. Elle me dit qu'elle travaille à Nancy, comme employée de maison, chez un avocat. Je m'étonne, lui demande s'il y a des enfants dont elle doit s'occuper, mais non, des enfants il y en a eu mais ils sont partis, habitent à Paris. Cinq jours par semaine, départ 7 heures 31, retour 18 heures 02, cette femme va tenir la maison de cet avocat et, je suppose, de sa légitime. Plumeau, fer à repasser, épluche-légumes, aspirateur, torchon, Jex vitres, Jex four, filet à provisions, thermostat 6, lessive, assouplisseur, ça existe, ça n'a rien de déshonorant, mais en général c'est une matinée ici, une après-midi là et le lendemain ailleurs, pas toujours au même endroit. Il fait exprès de salir, l'avocat ? En quittant la dame, j'ai l'impression de prendre congé d'une survivante du temps passé, d'une sorte de Céleste Albaret égarée au XXIe siècle.
 
           Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Cathares de Patrick Weber (Pocket, 2010).
 
 
MARDI.
           Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). La cuisine de référence, tome 2, fiches techniques de fabrication de Michel Maincent-Morel (BPI, 2004).
 
           Vie parisienne (à venir). J'apprends que l'association remue.net fêtera ses dix ans d'existence le 15 janvier prochain rue de Bagnolet. Comme je serai à Paris ce jour-là pour une réunion de l'Association Perec, je ne manquerai pas d'y faire un saut, il y a une belle densité de notuliens au programme.
 
           TV. Après avoir regardé le Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau, j'empoigne mon Théâtre de Rostand pour en relire des passages. Mon édition est celle parue chez Omnibus en 2006 avec une présentation de Claude Aziza. En parcourant la préface de ce dernier, je tombe sur ceci, page VI : "N'y aurait-il pas d'amour heureux, comme le chantait naguère Georges Brassens sur un poème, ne l'oublions pas, de Paul Fort, un jeune contemporain de Rostand ?" La bourde saute aux yeux, Brassens a souvent mis Paul Fort en musique mais là, pas de bol, c'est Aragon. Il n'y a pas de quoi fouetter un chat, ça arrive. Mais c'est tout de même un rien surprenant pour deux raisons : la première, c'est l'assurance dont fait preuve Aziza : son "ne l'oublions pas", et le fait qu'il rapproche les dates de Rostand et de Paul Fort, ce qui prouve qu'il y a bien eu une recherche. Elle aurait pu être un peu approfondie... D'autre part, au-dessus de Claude Aziza, il doit bien y avoir un éditeur, quelqu'un qui relit un peu le texte... Apparemment, personne n'a bronché, ce qui rend cette erreur de paternité assez incroyable.
 
 
MERCREDI.
                  Courrier. Arrivée Bulletin Perec numéro 57, concocté par mes soins.
 
 
JEUDI.
          Lecture. Le Correspondancier du Collège de 'Pataphysique. Viridis Candela, 8e série, n° 11 (15 mars 2010, 128 p., 15 €).
                       Le Collège continue le tour du monde de ses dépendances entamé dans le numéro 9 de son Correspondancier. En route donc pour Grenade, Buenos Aires, Santiago du Chili, Milan, Berlin, Ostrava et autres azimuts pour constater la vivacité de la Science in partibus. La revue présente quelques travaux émanant de ces Instituts dont un "Erotonomie de la Fiat 500" particulièrement utile maintenant que ce modèle semble effectuer son retour sur nos chaussées. A noter, dans les brèves qui occupent les dernières pages, une initiative qui mérite d'être relayée ici. La France des lettres croule sous les prix littéraires et on n'a pas souvent l'occasion de souligner l'apparition d'un prix enfin utile et intéressant :
Le prix international "littérature vieillesse" récompense les ouvrages de littérature molle et peureuse, frileuse et débilitante, ennuyeuse et niaise. Bref, les textes idéaux pour radoter au fond de son lit ou dans son fauteuil en bavotant un peu et en geignant beaucoup.
La "littérature vieillesse" est supposée équilibrer l'envahissante "littérature jeunesse", mais il n'y a pas d'âge minimal pour les auteurs, tant certains, dès leurs premiers vagissements, leur premier roman, leur première dissertation, semblent déjà avoir trouvé leur public. Une première brochette de "nominés" a été désignée à Bruxelles. Le plus notable d'entre eux est "Quatre-vingt-seize pour cent de la production contemporaine". Le jury, présidé par l'estimé Léger Péril, accueille les Culminants Régents André Stas et Docteur Lichic, ainsi que MM. Pierre Charmoz, Théophile de Giraud, Théo Poelaert et Laurent d'Ursel."
 
 
VENDREDI.
                 Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Très chère Sadie de Sophie Kinsella (Belfond, 2010).
 
                 Lecture. Les Ambassadeurs (The Ambassadors, Henry James, édition originale Methuen, Londres, 1903, nouvelle édition française Le Bruit du temps, 2010, traduction de l'anglais et présentation par Jean Pavans; 704 p., 29 €).
                              Sur ce coup-là, j'ai voulu jouer au gros malin et je l'ai payé cher. Plutôt que d'aborder Henry James par la pente douce, celle des nouvelles, j'ai voulu, appâté par une nouvelle traduction saluée de façon élogieuse dans les gazettes, m'attaquer directement à ce qui est considéré comme son roman le plus important. Mal m'en a pris. Je me suis heurté à un mur, et lequel - 700 pages en béton armé - que je n'ai jamais pu franchir ni contourner. Pourtant j'aurais dû me méfier, il y avait des indices : la première page, que j'ai dû lire trois fois pour essayer de la comprendre et le fait qu'on ait mis cinquante ans à remarquer que les deux premiers chapitres du Livre XI avaient été inversés dans la première édition américaine et dans celle qui la suivirent ne constituaient pas franchement des gages de clarté. Pourtant, l'histoire racontée semblait assez limpide : Strether, un quinquagénaire bostonien, est envoyé à Paris pour ramener au pays le jeune Chad que sa famille soupçonne de mener une vie dissolue. Mais l'ambassadeur succombe aux charmes de la vie européenne et renonce à sa mission. James illustre ici le conflit, qu'il a lui-même vécu, entre l'Amérique puritaine et bornée dont il est originaire et l'Europe éclairée où il passera les quarante dernières années de sa vie. Le récit, écrit le préfacier, "se fait à travers le filtre de la sensibilité du personnage central, filtre serti dans le regard que l'auteur porte sur cette sensibilité, sans jamais en dévier." Ce qui signifie que les événements, les faits ne sont pas relatés mais décrits uniquement à travers l'influence qu'ils exercent sur les consciences des personnages, au moyen de dialogues et de notations psychologiques. Au lecteur ensuite de reconstituer la trame des événements à l'aide de ce qui est plus une succession d'instants que d'actions. Sur un schéma identique, centré sur la diplomatie mondaine et sentimentale, Proust a fait des merveilles. Mais là où Proust est limpide, fulgurant dans sa compréhension et son exposition des mécaniques intérieures de ses personnages, James m'est apparu obscur, lourd, redondant. Mon manque de pratique de l'auteur explique sans doute ce rejet. Il est urgent, par conséquent, de reprendre les choses au commencement, aux nouvelles, et d'essayer ensuite seulement un autre monument, Les Ailes de la colombe ou La Coupe d'or.
 

 

SAMEDI.

             IPAD. 14 juillet 2009. 85 km. (10926 km).

 

86 habitants

 

   Deux monuments pour trois morts, les Poilus les plus choyés du département sans doute. Je trouve le premier dans le cimetière. C’est la croix la plus haute, qui occupe une position centrale, une croix sans signification particulière érigée en 1712 qui sert de support à ce monument : on y a ajouté un morceau de chapiteau (portant la cocarde du Souvenir français) et une plaque, provenant peut-être de l’église (fermée), attachée au fût de la colonne par un morceau de fil électrique. Quelques fleurs artificielles décorent l’ensemble.

 

 

Aux morts pour la Patrie

Donnez une prière

 

Raynal CLAUDE 1915

Raymond BASTIEN 1915

René SIMONET 1918

 

Qu’ils reposent

Dans la paix du Seigneur

 

   Le second monument, sur le côté de l’église, est une stèle de pierre blonde posée sur un carré de gazon.

 

 

   Face :

 

A ses enfants morts pour la Patrie

La commune de Courcelles reconnaissante

 

CLAUDE Raynal

4 juillet 1915

BASTIEN Raymond

30 septembre 1915

SIMONET René

6 mars 1918

 

   Gauche :

 

BOGARD Hubert

Déporté politique

Mort

Le 8 septembre 1944

A Salgitter*

Hanovre   

 

   Dos : 

 

NOIROT Nicolas

18 août 1870

Rezonville

CLAUDE Oscar

21 mars 1871

Affortern

 

   * Salzgitter, probablement. Je ne sais si c’est le graveur qui a oublié le Z ou si c’est moi qui ai fait une faute de copie.

 

             L'Invent'Hair perd ses poils.

 

Paris, boulevard de Port-Royal, photo de Marc-Gabriel Malfant, 15 août 2007

 

 

Bon dimanche.

 

 

Notules dominicales de culture domestique n°476 - 23 janvier 2011

 

DIMANCHE.
                  Lecture. Bizarre. Anthologie 1953-1968 (établie et commentée par Jean-Marie Lhôte, Berg International Editeurs; 674 p., 45 €).
                               Je suis né en 1960. La rondeur de la dizaine m'amène parfois à me demander ce que j'aurais vécu si j'étais né en 1940, 1950, 1970... Si j'étais né en 1950, j'aurais sans doute été encore trop jeune pour goûter tous les épisodes de Signé Furax mais j'aurais vu Le Gendarme de Saint-Tropez au cinéma, j'aurais acheté des 25 centimètres de Georges Brassens, j'aurais regardé Les Shadoks à la télévision et, j'en suis certain, je me serais abonné à la revue Bizarre. J'ai appris l'existence de celle-ci bien tard, en lisant les Nouveaux trucs et machins (Zulma, 2004) de Michel Laclos, qui en fut l'initiateur et le rédacteur en chef. 15 ans d'existence, 46 numéros dont certains atteignent aujourd'hui des prix coquets sur les marchés d'occasion. Autant dire que cette anthologie est une bénédiction. Elle n'a pas été confiée à n'importe qui : Jean-Marie Lhôte fit partie de l'équipe de Bizarre, on lui doit notamment l'intégralité d'un numéro consacré à "Shakespeare dans les tarots et autres lieux". Shakespeare et les tarots. C'est un bon raccourci des thèmes auxquels se consacrait Bizarre : de l'essentiel, du futile, de l'inattendu. Des auteurs auxquels, à l'époque, il n'était pas commun de s'attaquer : Gaston Leroux dès le premier numéro, Raymond Roussel, Boris Vian, André Frédérique... Des thèmes quasiment pré-oulipiens : le palindrome (en 1955), les fous littéraires (en 1956), l'art brut, le lettrisme... Des noms déjà connus ou qui ont fait du chemin depuis : Jean-Paul Clébert, François Caradec, Noël Arnaud, André Blavier, Francis Lacassin, Pascal Pia...Sans oublier la partie graphique : à époque où le dessin de presse est dominé par les Bellus, Kiraz et Faizant, Bizarre découvre, publie et soutient Topor, Siné, Chaval, et bien d'autres. Au fur et à mesure de ma lecture, je me suis aperçu que Bizarre avait rassemblé, au fil de ses numéros, la plupart des auteurs et des sujets auxquels je me suis intéressé pendant ces quinze dernières années dont j'ai vécu une bonne moitié sans connaître l'existence de la revue. En fait, si j'étais né en 1950, j'aurais peut-être gagné du temps.
                               Perle. Chaval, à propos de son oncle (n° 41, juin 1966) : "Il y avait chez lui du Léautaud en moins coquet". On voit le tableau. 
 
 
LUNDI.
          Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Voyage au bout de la nuit de Céline en Folio, La première leçon du sorcier de Terry Goodkind (Bragelonne, 2003) et surtout Initiation à la rhétorique de Christelle Reggiani (Hachette, 2001). Surtout parce que, pour la première fois, je vois quelqu'un lire un livre dont je connais l'auteur. J'ai même envie de demander à l'étudiante qui le parcourt si elle a des remarques à faire à Christelle Reggiani, remarques que je pourrais aisément colporter attendu que je dois voir ladite Christelle à la fin de cette semaine. Mais bon, j'ai déjà engagé une conversation la semaine dernière, j'ai épuisé mon crédit pour les sept ou huit années qui viennent.
 
 
MARDI.
           Souvenirs. J'ai essayé de rameuter les troupes quand j'ai appris hier le décès de P., avec qui j'ai travaillé une bonne douzaine d'années au collège de Châtel-sur-Moselle. Quelques coups de téléphone, quelques messages Internet. Je m'étais dit que j'annoncerais aussi la nouvelle au bahut mais quand j'ai voulu le faire, je me suis aperçu que ce n'était pas la peine : nous n'étions plus que deux ou trois à avoir connu P. J'ai l'impression que tout le monde a pris la tangente dans mon dos, sans que je m'en aperçoive. Ce sont donc uniquement les vieilles gloires qui se retrouvent, après la cérémonie, autour d'une table du PMU de Charmes. Il fut un temps où, avec P., R. et JP, nous constituions le quatuor de belote de comptoir le plus redoutable et le plus assidu du canton. Le quatuor est aujourd'hui une simple paire, au suivant de ces messieurs. En attendant, j'éprouve une sorte de sidération devant la vitesse avec laquelle on prend congé d'un être. Dans la rubrique nécrologique parue dans le journal local ou dans le laïus du prêtre qui officiait tout à l'heure, ça peut se résumer à ceci : il aimait la pêche, les champignons et les mots croisés. Et maintenant, dans la boîte. Ca peut faire réfléchir ceux qui se croient importants et inoubliables. Soixante-quinze ans d'existence, trois phrases banales et c'est fini. Dans un an, ce sera une note sur mon agenda à la date du 8 janvier : mort de P. (2010). J'écrirai à sa femme en faisant semblant d'avoir pensé à lui tous les jours de l'année écoulée, comme je fais semblant de n'avoir jamais oublié R. quand je vais voir son vieux père deux ou trois fois l'an. J'essaie de garder les souvenirs, mon agenda est rempli de dates funestes, je passe mes dimanches dans les cimetières, "de pierre tombale en monument" chantait l'autre, et pourtant, j'oublie, je vis. Je ne dois pas être le seul.
 
 
MERCREDI.
                  Vie musicale. C'est dans le journal. Soirée hommage à JiP, vendredi, salle de la Louvière, "concert qui débutera par une prestation du groupe Garlamb'Hic qui a connu de belles heures avec JiP et se reconstituera exceptionnellement pour l'occasion." En fait, si les organisateurs nous ont placés en tête du programme, c'est parce qu'ils savent qu'à nos âges on se couche tôt.
 
 
JEUDI.
          Emplettes. J'achète le premier volume de Mes Cahiers de Maurice Barrès, présenté par Antoine Compagnon. Barrès ? Quelle drôle d'idée. J'ai bien ses romans en Bouquins mais je n'ai jamais mis le nez dedans. Barrès, effectivement, c'est une question de nez. Des relents de nationalisme, de vieille droite rancie qui ne sont pas mes parfums préférés. Comment j'en suis venu à vouloir m'y intéresser ? Par une histoire locale. Un romancier du coin, connu, reconnu, bonne presse, bonne plume, s'est vu décerner en octobre dernier le Prix Maurice-Barrès. D'après le Guide des prix et concours littéraires de Bertrand Labes que j'ai consulté, ce n'est pas un prix idéologique : "le Prix Maurice-Barrès couronnera un ouvrage édité non déjà primé. Le prix spécial du jury sera décerné en hommage à une personnalité locale." L'association Mémoire de Barrès (Culture et Patrimoine du pays de Charmes) qui organise la chose n'est sans doute pas un repaire de dangereux gauchistes mais ça m'étonnerait qu'on y soit du genre à louer un gîte dans les Hautes-Vosges pour une réunion néo-nazie. Quoiqu'il en soit, à l'annonce de la nouvelle, stupeur du lauréat qui n'a jamais rien demandé à cette association. Il refuse le prix et expose ses raisons dans Vosges Matin où il tient chronique hebdomadaire. Raisons idéologiques, on ne peut plus recevables, à cause des relents précités. C'est ce rejet épidermique qui me donne envie de voir de plus près ce dont parle Barrès, selon le même mode de pensée un peu tordu qui fait que les braiements anticléricaux de quelque imbécile me donnent envie de retourner à la messe. Maintenant, ce qui serait intéressant, c'est de voir décerner le Prix Goncourt, ce n'est pas impossible, à notre romancier. Antidémocrates, phallocrates, antisémites en diable, les deux frangins n'ont rien à envier, question nausée, au vieux Maurice... Aurait-on alors droit au même rejet viscéral ? Je vais donc parcourir ces Cahiers. Peut-être pas les lire en entier mais quand on me donnera le Prix Maurice-Barrès, je veux pouvoir le refuser avec des citations exactes.
 
 
VENDREDI.
                 Vie musicale. Les musiciens ont bien de la chance. Lorsqu'ils meurent, pour peu qu'ils aient su se montrer aussi chaleureux dans leur art que dans leur existence, leurs collègues se réunissent et leur rendent hommage en se livrant à l'activité qui les a occupés au cours de leur vie. Ce qui n'est pas donné aux informaticiens, aux hommes grenouilles ou aux marchands de nougat. Il n'y a guère que les artificiers qui pourraient pratiquer ce genre de célébration sur un ton festif. Ce soir donc, c'est hommage à JiP à Epinal et j'ai eu la chance d'y être invité avec Garlamb'Hic, le groupe dans lequel j'ai chanté avec JiP pendant sept ans. Ce soir, à la Louvière, il y a de tout : des trompe-la-mort, des rescapés de baloches à Sarcelles et des dancings Printania, des chanteurs à texte, des chanteuses à voix, des recalées de la Star Ac', des troubadours en peau de chèvre, des faux manouches qui jouent aussi vite que les vrais, des yéyés évadés de l'hospice, des bluesmen arrachés aux bayous de la Moselotte, des rockers qui ont connu Albert Raisner jeune, des virtuoses, des maladroits dont la sincérité éclipse heureusement la suffisance de quelques m'as-tu-vu, très peu, qui n'ont pas compris que ce n'est pas en leur honneur que le public est venu. Une salle pleine, un son impeccable, une belle soirée, JiP méritait bien ça.
 
 
 
 
 
SAMEDI.
             Lecture. Nord (North, Frederick Busch, 2005 pour l'édition originale, Gallimard, coll. Du monde entier, 2010 pour la traduction française, traduit de l'américain par Stéphanie Levet; 368 p., 23,90 €).
                          C'est un livre qui aurait eu sa place, s'il elle avait survécu, dans la collection La Noire de Gallimard, aux côtés de ceux de Larry Brown ou d'Alan Watt. On y trouvait des polars plus psychologiques que procéduriers, des tranches de vie un peu décalées dans une Amérique de deuxième rideau, loin des clichés urbains habituels. Le nord ici présenté est celui de l'Etat de New York dans lequel revient un ancien flic, embauché pour retrouver un jeune homme disparu. L'entreprise réussira mais l'homme est surtout confronté au passé qu'il a vécu dans cette contrée, au souvenir de sa femme et de son enfant mort. Frederick Busch joue sur le dévoilement progressif du passé et fait le pari de la compassion dans laquelle il tente d'entraîner son lecteur. En vain : trop de non-dit, trop de conversations elliptiques, de propos tronqués, trop de sous-entendus qu'on ne devine pas et qui finissent par créer l'agacement. On piétine, on piétine, on n'avance pas et on se lasse. On n'ira pas voir plus loin dans l'oeuvre de Frederick Busch qui bénéficie ces temps-ci de plusieurs éditions posthumes - l'homme est mort en 2006.
 
 
             Vie parisienne. Je suis à 15 heures à la Bibliothèque de l'Arsenal où l'on se réunit dans la petite pièce où Charles Nodier tenait salon. C'est l'AG de l'AGP, en toutes lettres l'Assemblée générale de l'Association Georges Perec pour laquelle l'année 2011 s'annonce féconde : séminaire à Lille, colloque à Buenos Aires, publication du Condottiere, sortie du numéro 11 des Cahiers, Perec bouge encore et c'est tant mieux. Je file ensuite rue de Bagnolet où se tient une manifestation pour les dix ans de remue.net. J'arrive au milieu d'une lecture, m'installe en bord de salle et là, tout à coup, le coup de bambou. La tension de la semaine en attendant le concert d'hier soir, la nuit blanche qui l'a suivi - tension non évacuée, la peur de rater le réveil pour le 6 heures 59 -, l'heure passée dans le froid à Nancy à attendre un TGV qui n'arrivait pas (vol de cuivre sur la ligne), l'impossibilité de faire la sieste, tout cela me tombe sur le dos d'un seul coup, coup de massue en l'occurrence. Inutile d'insister, je ne tiendrai pas le choc. Je tourne casaque et j'en demande ici pardon à ceux que j'aurais pu rencontrer. 
 
             L'Invent'Hair perd ses poils.
 
Paris, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, photo de Marc-Gabriel Malfant, 13 août 2007
 
A ne pas confondre avec Les Frang'ines de Saint-Gérand-le-Puy (notules 356) ni avec les franges'in de Port-Vendres (410).
 
 
DIMANCHE.
                  Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
 
LUNDI.
          Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
 
MARDI.
           Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
           Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Le Huit de Katherine Neville (le Cherche Midi, 2002).
 
           En feuilletant Livres Hebdo. Jean-Claude Kaufmann, La trame conjugale : analyse du couple par son linge, Pocket, 6,90 €
 
 
MERCREDI.
                  Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Agnès Marietta, N'attendez pas trop longtemps  (Pocket).
 
                  Courriel. Une demande d'abonnement aux notules. En général, lorsque plusieurs demandes se succèdent, comme c'est le cas ces jours-ci, il y a quelque chose derrière. Le quelque chose, c'est un notulien prévenant qui me l'apprend : il a été question des notules et du notulographe dimanche sur France Culture. Heureusement que je n'ai pas entendu ça en direct : au moment de la diffusion, j'errais au volant à la recherche du monument aux morts de Fauconcourt. De saisissement, j'en aurais sans doute versé dans le fossé.
 
 
JEUDI.
          Epinal - Châtel-Nomexy (et retour). Marc Levy, Où es-tu ? (Pocket, 2003). Je connais la lectrice, elle est caissière à Monoprix, elle récupère régulièrement la carte bancaire que j'oublie tout aussi régulièrement dans le lecteur.
 
           Lecture. Les Chants de Maldoror (Lautréamont, texte de 1869, rééd. Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 218, 1970, in Lautréamont/Germain Nouveau, Oeuvres complètes; textes établis, présentés et annotés par Pierre-Olivier Walzer; 1478 p., s.p.m.).
                        J'ai déniché récemment le Lautréamont de François Caradec, que je ne voulais pas entreprendre sans avoir effectué une traversée intégrale, ce sera une première, des textes du bonhomme. Je ne me risquerai, ni pour ces Chants, ni pour les Poésies que je ne manquerai pas d'entreprendre bientôt, à aucun commentaire. Il existe en notulie des ducassiens de première bourre et j'ai suffisamment d'occasions de me ridiculiser pour ne pas éprouver le besoin d'en rajouter.
 
 
VENDREDI.
                 Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
                 Lecture. Le problème de la cellule 13 (The Problem of Cell 13, Jacques Futrelle, paru en feuilleton dans The Boston American, 1905, traduction française dans Vingt mystères de chambre close, anthologie de Roland Lacourbe, Losfeld, coll. Terrain vague, 1988, rééd. in Mystères à huis clos, Omnibus, 2007, traduit de l'américain par Isabelle Reinharez; 1148 p., 27 €).
                              L'intérêt de cette histoire de chambre close, plus alambiquée qu'ingénieuse, réside dans l'apparition du professeur Van Dusen, surnommé "La Machine à penser", mis en scène par Jacques Futrelle dans quarante-cinq nouvelles. Van Dusen présentait la particularité de résoudre les problèmes criminels qui lui étaient soumis par l'utilisation de la seule logique. C'est lui qui est ici à l'origine du problème posé à la suite d'une déclaration faite à une paire d'amis : "Enfermez-moi dans n'importe quelle cellule de n'importe quelle prison n'importe où, n'importe quand, vêtu du strict nécessaire, et je m'échapperai en une semaine..." Et ce qui fut dit fut fait. Un mot sur Jacques Futrelle, disparu avec le Titanic à l'âge de trente-sept ans : il a fait son retour en 1999 dans Les meurtres du Titanic, dans lequel le romancier  Max Allan Collins lui confie une enquête sur deux meurtres commis sur le paquebot avant son naufrage.
 
 

SAMEDI.

             Lecture. Guide des collections XVIIIe, XIXe et XXe siècles (Musée des Beaux-Arts de Rouen, Réunion des Musées Nationaux; 256 p., 100 F).

 

             IPAD. 15 août 2009. 160 km. (11086 km).

 

734 habitants

 

   C’est une stèle simple en granit gris, à flanc d’église, située sur une esplanade entourée d’une grille peinte en gris. Des jardinières et des vasques sont remplies de géraniums et d’autres fleurs non identifiées, en bon état de conservation. Un drapeau, des spots d’éclairage. On peut s’approcher du monument en gravissant deux marches et en poussant une petite porte qui ne grince même pas.

 

 

A nos enfants

 

Maurice ADAM

André FIGUIERE

André ADAM CNE

Henri GRELOT

Joseph MOUGIN

Paul BARROIS

Emile FAUCONNET

Georges LOUIS

Marcel ADAM

Georges VARNIER

Léon DANCIN

Emile BARROD

André BOUCHOT

Gabriel WANTIEZ

 

Morts au champ d’honneur

 

   Sur la base de la stèle, en lettres plus récentes :

 

Albert DANCIN

Noël JEHLEN

Pierre MILLION

Pierre LAMBERT

Georges BERCAND

André ROY

 

   L’église est en travaux, accès interdit.

 

             L'Invent'Hair perd ses poils.

 

Quintin (Côtes-du-Nord), photo de Bernard Gautheron, 15 août 2007

 

 

Bon dimanche.

 

 

Notules dominicales de culture domestique n°477 - 30 janvier 2011

 

DIMANCHE.
                  Lecture. Autres directions (André Blanchard, Le Dilettante, 2011; 224 p., s.p.m.).
                               Compte rendu à rédiger pour Vosges Matin.
                               Hors compte rendu, on lit de drôles de choses chez André Blanchard. Ou plutôt c'est lui qui lit de drôles de choses dans Cité Champagne, de Gérard Guégan, à propos de Julien Gracq : "on peut y apprendre soit du rudimentaire [...] soit de l'inouï, par exemple que Gracq fut, en juin 1971, entarté... avec de la merde par des situs qui vengeaient de jeunes révolutionnaires portugais poursuivis pour avoir chahuté les conférences que Gracq donnait au pays de Salazar, le consulat français ayant porté plainte sans que Gracq ne désavoue ce recours à la police dans une dictature, d'où cette pâtée. Purée, ça ne rigolait pas !" On y lit aussi des choses qui rejoignent l'actualité, en l'occurrence, la "révolution du jasmin" qui vient de secouer la Tunisie : "A la fin du XXe siècle, pour identifier les révolutions, on a substitué aux dates, qui étaient jadis leur matricule, une manière de blaze : révolution "des Oeillets", "de velours", "orange". C'est gentil tout plein, comme si chacune était, à la Révolution de 1789, ce qu'est, au repas, une dînette."
 
                  Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
 
LUNDI.
          Lecture. Poésies (Isidore Ducasse, 1870, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 218, 1970, in Lautréamont/Germain Nouveau, Oeuvres complètes; textes établis, présentés et annotés par Pierre-Olivier Walzer; 1478 p., s.p.m.).
                      Gallimard, 1970, je maintiens. Page 1146, une note sur les condisciples et amis d'Isidore Ducasse fait état des "fructueuses recherches des plus récents biographes, surtout François Caradec, Edouard Peyrouzet et Jacques Lefrère". En 1970, Jean-Jacques Lefrère, il doit bien s'agir du même, devait avoir seize ans. Précocité rimbaldienne ? Deux pages plus loin, une autre note mentionne l'article "Ducasse et Dolorès"de Michel Pierssens paru dans la Revue d'Histoire Littéraire de la France... en 1974. En fait, la bibliographie recense un tas d'ouvrages postérieurs à 1970. La Pléiade a donc révisé son appareil critique depuis la première édition, mais sans en faire état. Les notuliens au fait des choses ducassiennes le confirmeront peut-être.
 
 
MARDI.
           Courriel. Une demande d'abonnement aux notules.
 
           En feuilletant Livres Hebdo. Güllü Karanfil, Parlons gagaouze, L'Harmattan, 2010, 220 p., 12,50 €. Pourquoi pas ?
 
 
JEUDI.
          Lecture. Enquête sur la disparition d'Emilie Brunet (Antoine Bello, Gallimard, coll. nrf, 2010; 256 p., 17,50 €).
                       Avec Eloge de la pièce manquante qui l'avait fait connaître en 1998, Antoine Bello avait fait une entrée remarquée dans le monde du polar. Un livre sur l'art du puzzle, auquel il empruntait sa structure, quelque chose d'original et de remarquablement construit. On n'avait pas suivi le reste de sa production mais cette dernière Enquête prouve que l'homme n'a rien perdu de son talent. Cela démarre comme une histoire traditionnelle, pour ne pas dire archaïque : un triangle amoureux, la femme et l'amant qui disparaissent, un enquêteur et un suspect frappés d'amnésie. L'amnésie ! Depuis combien de temps n'avait-on pas utilisé cette vieille ficelle ? Sans remonter à L'Homme qui revient de loin de Gaston Leroux, le dernier ouvrage remarquable sur ce thème est peut-être Piège pour Cendrillon de Sébastien Japrisot qui date de 1962. D'autres auteurs contemporains s'y sont frottés - Michel Quint, Nicci French - mais n'ont pas marqué les mémoires - ce qui est peut-être inhérent au genre. L'amnésie donc, puis les références aux vingt règles du roman policier énoncées par S.S. Van Dine, plus quelques références à Agatha Christie donnaient l'idée d'une sorte d'exercice de style réalisé en hommage aux glorieux aînés. Mais peu à peu l'enquêteur se révèle un parfait connaisseur de l'oeuvre d'Agatha Christie et façonne son enquête à partir des crimes qui parsèment les livres de la dame. Le lecteur se trouve alors embarqué dans une relecture critique de la reine du crime, sur le modèle de ce qu'avait réalisé Pierre Bayard dans Qui a tué Roger Ackroyd. C'est fin, intelligent, vivifiant et captivant de bout en bout, jusqu'à la résolution finale qu'il convient de deviner entre les lignes.
 
 

SAMEDI.

             Football. SA Epinal - FC Sochaux-Montbéliard B 1 - 0.

 

             IPAD. 16 août 2009. 115 km. (11201 km).

 

194 habitants

 

   Le monument est neuf : il reste même des traces du ciment qui a servi à construire le socle sur les pavés qui couvrent l’esplanade au centre de laquelle il se dresse. Une croix et une palme ornent le sommet de la stèle. Deux jardinières de géraniums colorent le tout.

 

 

   Face :

 

La commune de Crainvilliers

A ses enfants morts pour la Patrie

1914-1918

 

GAUTHIER Maurice

Mort au champ d’honneur

1940

 

   Gauche :

 

CAMUS Henri

CHAPET Jean

CLEVY Adolphe

CROISE André

 

   Droite :

 

FERRY Adolphe

GACOIN Gaston

GRIVEAU Charles

JACQUIN Léon

 

   Dos :

 

MIDENET René

PERDERIZET Victor

POTHIER Louis

ROUX Henri

VAUTRIN Maxime

 

   L’église est fermée.

 

             L'Invent'Hair perd ses poils.

 

Saint-Cast (Côtes-du-Nord), photo de Bernard Gautheron, 17 août 2007

 

   La même enseigne figurait à Dieppe (notules 368).

 

 

Bon dimanche.